Pratiques N°78 Essence et sens du soin

Les métiers du soin devraient être pensés dans la perspective des attentes et besoins de la population, ce qui exigerait une politique qui prenne en compte la santé dans toutes ses dimensions. Or, la restructuration profonde des lieux et modes d’exercice et la dégradation des conditions de travail des soignants posent plus que jamais la question du sens de leurs missions. Il en est de la santé comme de toute la sphère publique et privée : l’inversion des priorités, la suprématie de la marchandisation causent des dommages conséquents sur le vivre ensemble et la santé des personnes.
Qu’attendent les patients et quelles sont les aspirations professionnelles des soignants ?
Malgré la dégradation profonde des conditions de soins, il subsiste chez la plupart des soignants des valeurs positives comme la solidarité, la compétence, l’attention à l’autre, le respect, l’éthique. Comment faire pour que ces aspects soient revalorisés et surplombent l’idéologie budgétaire ?
A l’hôpital, la segmentation des actes pratiqués, l’approche analytique comptable obligent à saucissonner les patients pour soigner leurs organes. Ces choix ont des effets collatéraux conséquents sur le contenu des soins ainsi que sur les priorités qui s’imposent, au grand dam des soignants comme des patients. Les médecins généralistes ne sont pas épargnés par ce changement de paradigme qui impose la segmentation des actes en lien avec leurs revenus.
Les soignants se sont laissé déposséder de l’essence du soin, ils se sont inclinés à leur corps défendant devant la rentabilité exigée qui a profondément dégradé leur propre estime de leur travail. Soigner se réduit alors à traiter.
Quels changements pourraient donner une place respectable et active à ceux qui souffrent ?
Les auteurs, soignants de différents lieux et métiers, montrent par la diversité de leurs approches et de leurs expériences comment ils font pour faire face à ce que la médecine traite désormais comme « quantité négligeable ». Certains soignants font preuve d’une inventivité remarquable pour répondre à une demande de soins très différente de celle pour laquelle ils ont été formés, qu’il s’agisse d’accompagner les migrants, victimes de situations de non droit, ou d’assurer le suivi des toxicomanes dont la conception des soins a radicalement changé avec les traitements de substitution.
Sauver les métiers de la santé (et préserver ceux qui les exercent) exige de remettre d’urgence le sens du soin sur le devant de la scène. Le repenser à partir des valeurs de solidarité permettrait aux soignants de retrouver le courage et le plaisir d’exercer, une « révolution » à laquelle il est urgent de s’atteler.

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