Présenté par Patrick Dubreuil
Médecin généraliste
S’appuyant sur une riche documentation, Thomas Coutrot, économiste et statisticien du travail, montre que s’intéresser à la nature du travail est une nécessité historique pour la gauche ; elle qui ne s’en est jamais vraiment préoccupée, pensant « contrer le capitalisme avec la démocratie politique, par les nationalisations, la redistribution des richesses, la planification démocratique ».
Un engagement électoral de Macron était aussi de libérer le travail, mais il organisa plutôt le travail jetable et libéra le capital, le néolibéralisme étant une « machine à extraire le profit » et à « écraser le travail vivant » en l’enfermant dans des contrôles managériaux et des contraintes financières, mais à quel prix !
En effet, « si l’épidémiologie a bien documenté les dégâts que la dégradation du travail inflige à la santé… les sciences politiques n’ont pas pris la mesure des dégâts causés à la démocratie ». Thomas Coutrot montre « comment la soumission imposée dans le travail pousse les salariés à la passivité (abstention lors des élections) ou à l’autoritarisme politique (vote pour l’extrême droite) dans la cité », étude de l’INSEE-Dares à l’appui [1].
Il faut donc aller chercher ailleurs que dans la cité, les causes des replis, des ressentiments et des haines : les lieux du travail réel.
L’auteur propose une piste pour sortir la démocratie de la violence économique et politique. Laquelle ? Libérer le travail, c’est-à-dire libérer l’initiative des travailleurs afin de leur donner plus d’autonomie et construire l’intelligence collective. Vous découvrirez dans quelles conditions celle-ci peut se mettre en place.
Après avoir relaté ces nouvelles pratiques démocratiques du travail concret qui s’appuient sur le prendre soin, l’auteur propose des perspectives politiques, avec l’idée empruntée à Bernard Friot, sociologue et économiste, d’un salariat à vie sans subordination, condition de l’émancipation.
« Workers, your lives matter » !
* Thomas Coutrot, Libérer le travail, pourquoi la gauche s’en moque et pourquoi ça doit changer, Seuil, mars 2018.