Jacqueline Gauchet
Patiente
Septembre 2018, j’ai 40 °C de fièvre pendant plus de trois jours avec une forte douleur intermittente dans l’oreille. Je cherche à consulter mon médecin traitant qui n’est pas joignable directement : pas de secrétaire, pas de contact téléphonique possible. Je ne peux que passer par Doctolib et le rendez-vous proposé est dans un mois. SOS Médecins ne répond pas… Le temps passe et au bout d’une semaine de fièvre entre 39 et 40 °C, je me sens dans l’incapacité d’aller aux urgences de l’hôpital, car je ne suis bien que couchée et je sais que j’y attendrais longuement…
Une amie me trouve un rendez-vous chez le médecin de son mari à 20 km de chez moi : prescription d’une IRM cérébrale, d’un bilan sanguin et ordonnance d’antalgiques. Le bilan sanguin révèle des anomalies qu’évidemment je ne sais pas interpréter et qui m’inquiètent beaucoup. J’arrive quand même à avoir un rendez-vous avec mon médecin traitant qui me prescrit un nouveau bilan, mais impossible de le joindre suite aux résultats qui ne sont pas normaux : maintenant, sur Doctolib, il y a trois mois d’attente pour obtenir un rendez-vous avec lui et c’est impossible de lui laisser un message pour qu’il me rappelle.
En désespoir de cause, j’appelle une belle-sœur, médecin retraitée, qui va interpréter ce bilan et me rassurer par téléphone, d’autant que la fièvre est enfin tombée et que mes douleurs se sont estompées.
Je n’arriverai plus jamais à avoir mon médecin traitant débordé par le nombre de ses patients qui, sans doute, prennent des rendez-vous systématiques à l’avance pour être sûrs de pouvoir le joindre, au cas où…
J’apprends quelques mois plus tard avec stupéfaction et tristesse que ce médecin s’est suicidé dans son cabinet.
Les rares médecins aux alentours, déjà eux-mêmes surchargés, sont dans l’incapacité d’accepter sa trop grande clientèle ; ils ne prennent plus de nouveaux patients et conseillent, via des messages affichés dans leur salle d’attente, de consulter les urgences.
De nombreux villages affichent, à leur entrée et sortie, leur recherche de médecin généraliste.
Fin juillet 2019, je suis allée voir un médecin généraliste près de chez moi. Celui-ci m’a d’abord expliqué très gêné qu’il ne pouvait pas me prendre comme patiente parce qu’il était débordé puis, après un échange généreux de sa part, il a fini par accepter, transgressant ainsi sa décision de ne plus prendre de nouveaux patients !!!