La multiplication de textes iniques et maltraitants reflète une idéologie qui bafoue le principe même d’une écoute bienveillante de la souffrance, à laquelle sont conviés les soignants. Les malades sont soupçonnés de fraude et les médecins de complaisance pour les arrêts de travail, dans un contexte où la précarisation fait des ravages et où les inégalités de santé ne cessent de se creuser. La politique sécuritaire, comme l’obligation de soin qui s’impose à certains patients en psychiatrie, compromet le sens même de la relation soignante qui ne peut s’épanouir que dans la confiance.
Cette idéologie du contrôle et de culpabilisation des patients d’être malades ou à propos de leur situation sociale, a mis sens dessus dessous des années de réflexion et de travail des soignants visant l‘amélioration des conditions d’accueil. Entre l’injonction de soin et son impossible mise en œuvre, comment sortir de l’impasse ? Les soignants doivent déployer des trésors d’ingéniosité et faire preuve d’un certain courage, aux dépens parfois de leur propre équilibre, pour accueillir et soigner les patients en dépit des restrictions plus subtiles les unes que les autres qui affectent les soins.
Cette situation ne peut changer sans un bouleversement profond du regard que porte la société sur les plus faibles des siens. En attendant, il est essentiel d’accueillir du mieux possible, de « panser » les situations, avec tous les moyens, toute la capacité de subversion qu’exige la résistance à l’injustice.
N°57 - avril 2012
---- Troisième partie : Soignants, « panser » l’accueil
Pratiques N°57, mai 2012