Joséphine Corbel
Orthophoniste
Dans mon quartier, il y a un antiquaire et un cordonnier.
Pour des tas de raisons, je me dis que c’est signe de bonne santé pour mon quartier.
Chaque jour, ils s’adonnent à faire du neuf avec du vieux, lustrer, cirer, caresser, bichonner, chouchouter ces objets pleins âmes.
Ils prennent le temps de les astiquer. Quand je vais leur rendre visite, je m’assure bien de ne pas avoir de rendez-vous dans l’heure qui suit, parce qu’ils ont le temps EUX.
Y aller en coup de vent pour déposer une paire de chaussures ou un miroir à réparer et repartir aussi sec ? N’y pensez pas, ils ne comprendraient pas.
Parfois je les admire, parce que je trouve qu’ils ont de beaux et précieux métiers. Il m’arrive parfois même de les envier.
Ils Font tous les jours avec leurs mains, et à la fin de la journée ils peuvent Voir ce qu’ils ont fait. Ils redonnent vie. Et pendant ce temps-là, ils ont le temps de penser à tout ce qu’ils veulent, à inventer des histoires, imaginer la vie de leurs objets, s’arrêter lorsque le gling-gling de la porte tinte.
Dans le monde néolibéral dans lequel nous vivons, je vois en leurs métiers un acte de résistance.