Lisa
L’échographe blêmit. « Euh, j’appelle un confrère, c’est la démarche habituelle quand on trouve une pathologie ». Me voilà seule devant l’écran noir parsemé de taches blanches. Après un conciliabule inaudible, on m’annonce : « Vous voyez, là, sur l’ovaire gauche, il y a un kyste de dimension importante, l’image est tout à fait différente à droite ». « Ah oui ? À vrai dire, je ne vois rien... » « Mais si, là... » Si vous le dites. J’aurai beau sonder les images, je n’en tirerai rien de plus. À la radiographie, les choses sont plus claires. « Vous voyez la tache blanche à gauche ? » « Oui, très bien. » « C’est le kyste, il est visible parce qu’il est calcifié. » Ah. « C’est une bonne nouvelle. » Oh ? « Cela évoque un kyste dermoïde, ce n’est probablement pas une tumeur maligne. » Bien, tant mieux. Mais un kyste dermoïde, qu’est-ce que c’est ? « Ce sont des cellules de la peau qui sont là et qui se mettent un jour à se développer, on peut trouver des poils, des cheveux, des dents... » Des dents dans l’ovaire ? Comment ? L’imagination préfère prendre des vacances en attendant, et c’est tant mieux. Quelques jours plus tard, l’opération a eu lieu, les vapeurs de l’anesthésie se dissipent doucement dans les heures qui suivent. Le chirurgien passe faire sa visite, l’air jovial, rassurant et content. « L’opération s’est bien déroulée, elle a duré plus longtemps que prévu ». Il semble qu’on ait colmaté au passage quelque brèche quelque part, c’est confus, la tête ne suit pas tout. On me tend des papiers. « Tenez, regardez, là, c’est l’ovaire avant l’intervention, voyez comme il est gonflé, et ici, vous le voyez après. » De vraies photos de mes entrailles, cette fois, et en couleur s’il vous plaît, des roses, des jaunes, un corps gonflé et luisant qui semble près d’éclater, puis aplati comme une crêpe. « Ah, euh, oui... Merci (?). » Maintenant, ces photos, qu’est-ce que j’en fais ?