L’imagerie médicale a pris une place considérable, non seulement dans la pratique des médecins, pour orienter le diagnostic, le pronostic et la prescription, mais aussi dans les affectations budgétaires, les choix technologiques et l’organisation spatiale des lieux d’investigation et de soin.
Mais elle a, outre ces impacts incontournables en termes de santé publique, des impacts beaucoup plus insidieux en termes politiques de gestion des populations, et en outre de très lourds impacts symboliques en termes de rapport au corps, posant des enjeux proprement esthétiques de représentation et de relation à l’image.
C’est pourquoi nous avons choisi d’intituler ce numéro Que fabriquent les images ?, titre qui fait clin d’œil à l’ouvrage fondateur de l’anatomiste Vésale au XVe siècle, La Fabrique du corps humain ; mais titre aussi qui met en évidence le pouvoir de l’imagerie comme puissance de transformation de l’activité médicale, de bouleversements socio-économiques et de mutations de l’imaginaire.
Nous avons voulu que ce numéro interroge concrètement les pratiques, et fasse parler les acteurs de terrain, médecins, paramédicaux ou patients, de la façon dont l’imagerie intervient dans le quotidien de leur activité ou dans leur vécu de la santé, de la maladie, de la naissance et de la mort.
Mais nous avons aussi voulu, comme toujours à Pratiques, que ces expériences trouvent un écho dans des questionnements anthropologiques, sociologiques, psychanalytiques, économico-politiques ou philosophiques qui leur sont liés. Ainsi que dans des questionnements esthétiques qui sont indissociables des problématiques de l’image, et portés ici non seulement dans les articles qui en traitent, mais dans le travail d’un artiste contemporain dont les images font la couverture et scandent le dossier.
C’est pourquoi ce numéro s’oriente dans trois directions, à partir de trois problématiques majeures suscitées par l’imagerie médicale :
— Quels bouleversements dans la pratique médicale ?
— Quels enjeux socio-économiques ?
— Quels impacts sur les représentations du corps ?
Nous vous invitons ici à vous approprier ces questions, à y réagir, à les réfléchir et à participer ainsi aux débats et à la dynamique que nous voulons susciter, afin que l’imagerie ne soit pas le prétexte à une passivité des sujets, mais au contraire le moteur de leur interrogation critique.
N°51 - décembre 2010
— Dossier
Pratiques N°51, décembre 2010