Martine Lalande,
médecin généraliste
Mehdi est à Marrakech... mais il n’y est pas retourné de son plein gré. Il était venu en France car, son grand-père décédé, il s’était retrouvé à la rue, sans famille, et comme il parlait anglais et français, il avait eu l’idée de tenter sa chance en Europe. Il n’avait pas de papiers, mais avait besoin de se soigner, car après plusieurs mois d’errance, il était très déprimé. On l’avait aidé à obtenir l’AME, et il venait de récupérer sa carte, avec nom, prénom, photo et numéro d’Assurance maladie. C’est ce qui a permis à la police, au cours d’une vérification d’identité, de savoir tout de suite d’où il venait, et qu’il était « sans papiers ». Et de l’expulser.
Il fut un temps où avoir l’AME était une protection, la personne montrait le papier à la police, qui en concluait qu’il avait fait des démarches pour s’insérer. Si maintenant le fait d’avoir des droits équivaut à une stigmatisation, voire une dénonciation du statut d’« illégalité », les personnes les plus démunies ne vont plus les demander, préférant rester cachées, protégées par l’anonymat. Et voir leur situation se précariser encore plus. À pleurer...