Tiraillés entre les usagers, les médecins, les contraintes médico-administratives et leurs propres divisions, les personnels infirmiers éprouvent de la difficulté à se faire entendre dans les institutions. Leur aspiration à une certaine autonomie se heurte aux multiples attentes des autres acteurs, ainsi qu’à leurs propres constructions identitaires, plus proches des images d’Epinal que de la réalité. La pression institutionnelle cherche à canaliser ces attentes dans une réingénierie globale des métiers qui privilégie l’aspect gestionnaire et distancié des situations à la fonction plus directement soignante. Les mesures statutaires qui accompagnent ces changements sont bien loin des aspirations de ces soignants en perpétuel désarroi identitaire. Du fait de leur histoire et tenus sous le joug de la religion puis de la médecine, les infirmiers sont pénalisés par leur difficulté à se définir collectivement dans une société qui préfère ne pas voir ce qui se joue dans les lieux de souffrance. Le conflit, non assumé, réside entre deux manières d’aborder la question : un repli dommageable sur une position insatisfaisante et une réforme contrainte par un contexte général défavorable. Pratiques fait le pari d’une troisième voie, celle d’un réinvestissement des aspects humains et d’un développement de savoirs appropriés à ce choix.
N°54 - juillet 2011
---- Première partie : Un déficit de reconnaissance
Pratiques N°54, juillet 2011