par Éric Bogaert, psychiatre de secteur retraité
J’ai vu il y a quelques mois ce film, qui m’a donné envie d’écrire quelques mots pour rassembler les idées qu’il m’en a conçues. Et puis les notes, rangées méticuleusement dans le nuage où s’accumulent mes projets en décantation pour mûrissement, ont disparu, avec d’autres. J’étais dépité d’avoir perdu ces notes, déçu d’avoir oublié ces idées – géniales, forcément géniales !? –, mais il m’en restait des images, des reliefs fantomatiques, qui ont continué de mûrir dans ma caboche. L’organisation d’une projection du film et la parution d’un numéro de Pratiques sur les images m’ont poussé à revoir ce film pour enfin en écrire cette note de visionnage.
Objet filmique déroutant
Avant même de voir le film, son titre m’a interrogé, et même estomaqué. Qu’est-ce que c’est, cette injonction à oublier celui-là qui, homme et psychiatre, m’a toujours attiré et intrigué (voilà pour la déclaration d’intérêt). Je ne voulais pas voir un film qui m’appelait ainsi. Mais, pour le bonhomme, j’y avais jeté un œil, au début seulement, vite fait dans un moment creux. C’était sa version originale, en catalan et espagnol. Pas seulement les mots qu’y dit Tosquelles [1], ou plutôt la boule noire de sa tête vue de dos et en gros plan comme l’affiche, mais aussi cette voix de femme qui se confiait, entre deux séquences du monologue magistral, doublant de vieux films familiaux, m’ont donné l’envie d’en reprendre le visionnage en prenant le temps d’être disponible et dans sa version française – enfin, Tosquelles y parle toujours catalan, mais un catalan sous-titré en français.
Mais même en version française, l’objet filmique est particulier. Si on peut être dérouté à l’entrée dans le film, effet de surprise qui nuit peut-être à en saisir le propos, l’étrangeté qui s’en produit n’est ni gratuite ni inutile. Elle fait partie du voyage même, fond et forme confondus et, en imposant comme une réinitialisation des réglages conventionnels de la machine à penser qu’on se trimbale d’ordinaire, elle permet de s’ouvrir sur un autre monde et de revoir ses réglages, peut-être même au-delà de la séance de cinéma.
Les images
Le film s’ouvre avec un long plan quasiment fixe de la tête de Tosquelles – serions-nous invités à voir le monde avec ses yeux, tout en ménageant une zone aveugle ? – filmé lors des Rencontres de Saint-Alban.
Puis il y a trois films en un, à partir d’archives de la famille Tosquelles. Des images de film amateur montrent une famille, des enfants faisant une représentation théâtrale, des adultes en voyage à Paris, à Port Vendres, en avion, ou chez eux.
D’autres images montrent la vie quotidienne dans l’hôpital psychiatrique de Saint-Alban, des patients qui déambulent, travaillent à l’ergothérapie, participent à la construction d’un bâtiment, se soignent, font la fête… ou des travaux et l’inauguration du Clos du nid, établissement médico-social fondé par Tosquelles et l’abbé Oziol à Marvejols, à quelques kilomètres de Saint-Alban.
D’autres enfin relèveraient plutôt de films d’art et d’essai : des paysages de bois enneigés, une route dans une vallée, des séquences en couleurs et floues dans un lieu de passage qui ressemble à une gare, probablement maritime…
Un Père Noël apparaît à l’occasion dans des bois enneigés, ou dans la famille à Saint-Alban.
Ces trois films muets sont, comme il se doit, scandés par des cartons sur lesquels sont écrites des phrases comme des aphorismes, tandis que la voix de Tosquelles se raconte, homme et psychiatre, et qu’une voix de femme nous fait des confidences, qui sont en fait celles de témoins qui évoquent leur rencontre avec Tosquelles.
Ces images ne racontent pas une histoire, mais mettent dans une ambiance, vieillotte, noir et blanc oblige, et miséreuse, mais aussi d’un touchant amateurisme, bricolé ici ou là d’un surréalisme à la six-quatre-deux. Elles n’illustrent pas le texte au premier degré, mais paraissent souvent entrer en vibration, en résonance, avec son propos.
Le travail essentiel du film a dû être de monter des images du passé sur un scénario fait de collages de textes choisis. Une sorte de collage surréaliste, art brut ?
Le texte
Il ne s’agit pas d’un documentaire sur Tosquelles, l’homme, sa biographie, ni sur la psychothérapie institutionnelle, son histoire, ses concepts. C’est une tentative de saisir le sujet Tosquelles, et de façon subjective. L’objet du film serait plutôt ce qui était incarné en Tosquelles et qui a jailli dans son œuvre, tel que le réalisateur a pu le percevoir.
D’une transcription du texte du film, j’ai essayé d’en faire un résumé. Je n’y suis pas parvenu. Je pense que c’est impossible, parce que justement, ce n’est ni une biographie ni un documentaire. On y croise sa vocation de médecin, les fous qui échouent à être poètes de leur vie, quelques vols et menteries fabuleuses qui auraient participé à le constituer, un engagement critique qui fait la densité de l’homme et des contradictions qui le rendent humain et insaisissable, la grandeur et la misère de la psychiatrie et de la vie en général, la science qui n’est rien sans allégeance à l’homme, le psychiatre qui suit le patient à un pas derrière lui, tous deux traversés par les mots, étrangers à eux et qui pourtant les consistent, et leur survivent, les ophtalmologues qui s’occupent de l’œil tandis que les psychiatres s’occupent du regard, des troubles de l’accommodation des fous, se regarder jusqu’à son tréfonds (sa jachère) pour soigner les fous, ce qu’il a appelé la déconniâtrie, (re)connaître l’enfant qui est en nous, fuir la mainmise sur l’autre, la maîtrise, qui n’empêchent pas, voire provoquent la mort en oubliant l’individu pour la masse (être le bon pasteur ?), la particularité pour la règle, au risque d’être mis à mal, ce qui est pourtant le sort commun, et le temps passe, on se lasse, on se tasse, on sent que tout prend la tasse, survivre plus que vivre, mélancolie, oubliez-moi…
Si ceci n’est pas clair, rationnellement cohérent, constitue un discours qui peut laisser perplexe, on sent bien que c’est un enseignement syntagmatique sur la folie, la vie, d’autant qu’il suscite des émotions très fortes qui viennent d’on ne sait où, sinon de la vérité qui l’anime, la vie, la mort, le sexe. Cet entretien qui précède le titre du film en est le paradigme, scandé par ce raaah que Tosquelles y pousse pour figurer la femme qui passe sa nuit à mourir, cri fou de rage d’impuissance et de révolte qui nous sidère d’effroi.
Et on sent, à mesure que s’écoule le temps, qu’on passe d’une force créatrice à une mort redoutée mais assumée, avec un fatalisme à l’arrière-goût de rage, don Quichotte qui se résout à rendre les armes, échouant inévitablement dans son combat, « délirant », contre la mort.
Les entrelacs
Lorsque Tosquelles parle tandis que défilent les images de ses films de famille, émane une impression étrange de deux discours qui se superposent sans que l’on puisse saisir clairement les deux à la fois ni ce qui les rassemble. Soit on lit le texte, et on ne voit pas les images, soit on regarde les images, et on ne sait pas ce qu’il dit, seulement bercés par la musique de l’accent.
L’homme, la psychothérapie institutionnelle, le film, sont un patchwork, où dans un work in progress, trois chaînes hétérogènes indistinctement liées, ou dit autrement étrangères mais familières, s’entrelacent pour produire un objet qui ne peut être ramené à chacune de ces chaînes ni s’en déduire, mais produit des effets complexes et insaisissables. L’inconscient est touché, et marqué.
L’intrigue
Le personnage m’a toujours intrigué. Curieux personnage – curieux, étymologiquement, qui prend soin, mais aussi désireux de savoir, enfin digne d’intérêt, original, étrange (dictionnaire historique de la langue française Robert).
De n’en avoir jamais entendu parlé [2] pendant mes années de formation et de début de pratique en psychiatrie, dans des lieux où on se réclamait de la psychothérapie institutionnelle sans jamais évoquer ni les noms de ses hérauts ni les concepts de ses inventeurs, tout en constatant la vigueur et l’intérêt de cette pratique. Et plus tard, l’entendant parler, d’être surpris que des séquences cliniques avec des patients revenaient sur le métier de ma pensée en s’éclaircissant, mon esprit quittant le fil de son discours avant d’y revenir, pas perdu pour autant, quelques instants après. Enfin le bonhomme, rond, roublard, perçant, accentuant ses propos, parfois très personnels, parfois très cultivés, toujours emmêlés de tonalités catalanes et de silences qui finissaient en borborygmes entre hum, hum et hein, hein, ne se perdant pas dans les escaliers de son esprit, pouvait être déconcertant, entre trublion clownesque et sphinx devin.
Telle est l’intrigue de ce film.
Et l’oubli, alors !
Alors pourquoi faudrait-il oublier Tosquelles ?
Alors que l’homme et la psychothérapie institutionnelle deviennent objets muséologiques, honorés par des expositions, des films, des bouquins, construisant une légende, les mêmes sont honnis par les autorités de la Santé, qu’elles soient gouvernementales ou hélas aussi psychiatriques. Et il faudrait l’oublier !
On peut trouver dans ce film deux explications de ce titre. Tosquelles appelle lui-même à l’oublier, d’abord pour ne pas « s’aliéner en lui », ensuite parce que « personne ne pourrait se souvenir sans avoir oublié », ça « sortira quand ce sera nécessaire ».
Peut-être le réalisateur du film en a-t-il d’autres.
Mais il en est ainsi d’un processus sain de l’apprentissage, il faut s’abreuver à la source du savoir, auprès des hommes, des livres, en comprendre, prendre avec soi ce qu’on peut, puis oublier, et créer, en faisant dans un autre contexte le chemin que nos anciens ont suivi avant nous, notre propre expérience inspirée des traces que leur apprentissage a laissées. C’est de l’ordre d’une identification libre, du moins se libérant de l’aliénation au maître.
La Psychothérapie institutionnelle n’est pas une théorie – ou plus actuel et pire, un protocole – à appliquer, répliquer, dupliquer, mais une praxis à inventer – découvrir et créer –, qui on est là, où on est, et avec qui on travaille.
Oubliée la matière, que souffle l’esprit, raaah… donne vie.
Quelques questions au réalisateur du film
J’ai quitté la région parisienne pour travailler à Saint-Alban, avec le désir de me coltiner au plus près avec ce qui m’intriguait. Mais qu’est-ce qui a poussé Enric Miro à faire ce film sur Tosquelles ? Ce catalan a-t-il été mû par le désir de peindre la catalanité, la saisir et la représenter ?
Eric Bogaert : Si le personnage de Tosquelles est le sujet du film, la question de sa découverte par quelqu’un qui n’est pas du milieu psy, même s’il est catalan, quelques années après la mort de celui-ci, se pose, et pourrait être abordée avec quelques développements. Pas pour en connaître les éventuels aspects personnels et intimes, mais pour en situer le contexte social et culturel, ou dit autrement, quelle place occupe Tosquelles une vingtaine d’années après sa mort dans la Catalogne d’aujourd’hui.
Enric Miro (EM) : Il est inconnu de la population catalane, même si récemment une exposition [3], qui lui était consacrée, présentée dans plusieurs grandes villes, Toulouse, Madrid, New York… s’est aussi tenue à Barcelone. Dans le milieu psychiatrique, si les psychiatres catalans le connaissent probablement, lorsque le film a été présenté à l’institut Pere Mata, où Tosquelles a débuté l’exercice de psychiatrie, de Reus, ville où il est né et a vécu son enfance, pas un n’est venu assister à cette projection en 2024, sinon un vieux psychiatre retraité et quelques vieux soignants. Et même, l’annonce de sa mort, en 1994, y a été accueillie par des applaudissements… de soulagement : enfin libérés du poids de cette figure tutélaire embarrassante.
EB : On comprend bien que ce film n’a pas vocation à instruire le spectateur de la psychiatrie, de l’histoire et la théorie de la psychothérapie institutionnelle, mais plutôt de partir à la recherche de ce qui fait que cet homme ordinaire (notamment promis à la mort comme chacun des spectateurs) a vécu cette vie-là. On comprend bien qu’il s’agit de se pencher sur la subjectivité de celui-là ; comme paradigme de toute subjectivité… mais d’où t’est venue alors l’idée de faire de Tosquelles le sujet d’un film ?
EM : Tosquelles est le personnage de mon film par pur hasard. Les premiers mots d’Oubliez Tosquelles ! sont : « Le hasard, dans cette histoire, importe. On rencontre les fous si on laisse une chance au hasard ». Tous les personnages de mes films sont apparus par hasard. Je ne les ai pas recherchés. Comme tu dis, je n’ai aucune relation directe ou indirecte avec le monde de la psychiatrie, psychanalyse... pas du tout. Par contre, dans tous mes travaux la folie a toujours été présente, comme la mort. C’est ce que j’ai remarqué en regardant en arrière. Je n’ai jamais prétendu chercher une raison à cela. C’est ainsi.
Lors de mes premières approches de Tosquelles, j’ai découvert un personnage amusant. J’ai vu pour commencer La politique de la folie de François Pain et j’ai beaucoup ri. Et à partir de là, le personnage m’a fasciné. Quand j’ai approfondi sa connaissance, j’ai trouvé en Tosquelles quelqu’un qui peut voler dans les hauteurs mais en même temps être agrippé au sol, construire un discours intellectuel profond tout en étant le plus familier et simple possible. Quand il descend sur terre, c’est là qu’on comprend tout et surtout l’énorme dimension du personnage. Tout le monde n’est pas capable de se déplacer dans cette dualité…
EB : Qui est Antonio Sopetes, auquel tu dédies ce film ?
EM : Antonio Sopetes était un grand ami qui est mort l’été de 2023 d’un cancer du pancréas. Il était mon meilleur ami et je l’ai accompagné de près les derniers mois de sa vie. Il n’a jamais pu voir Oubliez Tosquelles !
EB : Plus dans le registre de la technique, et de la subjectivité d’un cinéaste, comment s’est construit le film, de la rencontre du personnage de Tosquelles, à la conception du film, son scénario, sa mise en forme, le choix des images…
EM : J’accepte le défi de réfléchir à mon propre travail. Peut-être l’ai-je déjà fait inconsciemment, mais je ne l’ai jamais projeté dans l’écriture. La nature même du film, apparemment fragmenté, marque le pas de mes réflexions. Peut-être vous servent-elles à quelque chose que j’ignore. Peut-être me servent-elles à quelque chose que je ne connais pas non plus. En voilà des fragments.
La découverte du personnage de Tosquelles m’a placée face à deux questions essentielles de l’existence de l’homme : la mort et la transcendance. Je crois qu’Oubliez Tosquelles ! est imprégné, de la première image jusqu’à la dernière, de ces deux questions. Dans le processus de création, je prends ma propre transcendance et celle de l’œuvre comme une projection de la transcendance de Tosquelles. Tosquelles agit comme un miroir. L’auteur souhaite que le personnage devienne le miroir du spectateur lui-même. Ne pas y parvenir est une sorte d’échec. La transcendance et la mort sont intimement liées à l’oubli. Il y a un courant souterrain qui les relie.
EB : On perçoit effectivement très fortement dans le film ces deux questions, de la mort surtout, mais aussi, moins fortement, sans doute parce qu’elle est moins chargée émotionnellement, de la transcendance. Mais cette assertion que « la transcendance et la mort sont intimement liées à l’oubli », qu’« il y a un courant souterrain qui les relie » mériterait d’être un peu plus argumentée, si c’était possible.
EM : Dans la bande-annonce de Oubliez Tosquelles !, il y a un passage du film qui dit que « Tosquelles était très préoccupé par la mort, par ce qu’il allait laisser de son passage sur terre… ». Personnellement, je crois que ce que tu laisses est ce qui transcende, ta transcendance. Tes échos. La plupart du temps, la mort obscurcit ces échos, plus ou moins, mais c’est souvent le cas. L’oubli suit. La mort est un cimetière d’oublis. Et donc de transcendances. Tosquelles disait lui-même qu’il était athée (bien qu’il invoquait Dieu tous les jours). C’est pourquoi je ne crois pas que Tosquelles n’était pas préoccupé par la transcendance (la mort) dans un sens religieux. Bien que je ne puisse garantir qu’au moment de sa mort, il n’ait pas été emporté par un courant souterrain qui lui a permis de ne pas s’oublier de soi-même.
EB : Comment as-tu procédé pour choisir les textes, les images, et les monter ensemble ? Quels liens as-tu voulu installer entre le texte et les images ?
EM : Je n’ai pas écrit de scénario préalablement. J’ai choisi des citations, des séquences, mis tout ça sur la table, et guidé par l’inspiration, mes associations, mon fil conducteur – les idées que je voulais illustrer, la mort, la transcendance, Tosquelles comme le miroir dans lequel je me trouvais reflété, mais aussi comme l’est tout représentant de l’espèce humaine –, et aussi parfois le hasard, j’ai composé le montage en parallèle de ces trois fils, les cassettes de Reus, les films de famille, et les citations sur Tosquelles.
EB : Procéder ainsi, prendre les images filmées par un autre et en faire un usage qui n’est très probablement pas celui qui était dans l’intention de son auteur, n’est-ce pas un travail d’interprétation des images, à l’instar de la psychanalyse ou de la paranoïa, faisant de toi un manipulateur et/ou un jouet des images…
EM : Je ne sais pas, je ne suis pas psychanalyste ou psychiatre. C’est un travail de manipulation. Comme Tosquelles le dit lui-même dans le film, il était un manipulateur. J’ai interprété les images et leur ai donné une place en fonction de ce qu’elles pouvaient résonner avec mon propos ou l’appuyer. Mais j’ai sans doute aussi parfois été manipulé par celles-ci malgré moi.
EB : Alors, collage surréaliste, art brut, ou… ?
EM : Plutôt film muet, où on entend des voix (d’outre-tombe ?). La consigne donnée au musicien était de faire au piano seul un accompagnement musical comme ceux des films muets.
EB : Enfin, pourquoi nous enjoindre d’oublier Tosquelles ?
EM : L’origine du titre, pourquoi Oubliez Tosquelles !, est autre, plus prosaïque, personnelle et politique... Dans la phase de documentation sur Tosquelles, que je ne connaissais pas car l’environnement psychiatrique m’était inconnu, j’ai découvert la dimension « politique » du personnage. Et je veux parler de la politique de transgression et de remise en question du pouvoir et de la hiérarchie, entre autres. J’avais vu dans les années quatre-vingts un film allemand, Oubliez Mozart ! [4], qui traitait de l’ascendance maçonnique du compositeur et comment il était inconfortable pour le pouvoir de l’époque. Je suppose aussi pour son irrévérence et génie. Il n’y a rien de pire pour le pouvoir que de lui faire sentir son ridicule. Tosquelles était un maître en cela. Ou du moins, je crois qu’il l’était. J’ai découvert plus tard qu’il y avait un livre intitulé Oublier Foucault [5]. De l’oubli à l’oubli.
Ce que nous demande le pouvoir en nos jours de déshumanisation, c’est de rester parqués comme des moutons, en nous privant de notre humanité. En réponse à cette injonction, j’ai voulu montrer un personnage excentrique, excessif, qui contestait le pouvoir, dire qu’il fallait résister, vivre, même si au bout il y a la mort.