Entretien avec Babeth et Claude Teyssier, paysans maraîchers, qui racontent leur parcours de l’agriculture conventionnelle au bio et à la constitution d’une AMAP.
Propos recueillis par Anne Pagès
Pratiques : Claude, qu’est-ce qui t’a amené au travail de la terre, à être paysan ?
Claude : Naturellement, comme beaucoup de paysans. Mes arrières grands-parents, mes grands-parents, mes parents étaient agriculteurs et j’ai vécu toute mon enfance à la campagne et dans ce métier. J’ai fait le lycée agricole, mais ce métier s’apprend dans les champs, il ne s’apprend pas à l’école. À l’école, tu apprends à lire, à compter, à réparer un peu le tracteur ou à calculer un peu les besoins des sols, ou les mètres cube d’eau dont tu as besoin pour ta pompe, mais le savoir profond de faire pousser les plantes, il s’apprend sur le terrain… Pour former un jeune agriculteur qui ne vient pas du milieu, il faut qu’il travaille au minimum cinq ans avec un paysan, un vrai, pour commencer à apprendre le métier.
Et toi, tu n’as pas eu de doutes sur ta motivation ?
Claude : Ma vie a été dirigée vers ce métier-là, parce que j’ai perdu ma maman quand j’avais deux ans. À 18 ans, je suis resté seul héritier avec mon oncle sur la propriété de mes grands-parents. J’avais des terres à moi, la voie était tracée aux côtés de mon père.
À dix-huit ans, tu te retrouves avec tes terres, tu décides de faire quoi et comment ?
Claude : Mon papa et moi étions spécialisés melon, surtout melon de Cavaillon et un petit peu de poires et pommes.
Tu n’étais pas en bio à cette époque ?
Claude : Non, au lycée agricole, on ne m’a jamais parlé de « bio ».
Ça n’existait pas à cette époque ?
Claude : Dans les années soixante-quinze – quatre-vingt au lycée agricole, en économie, on te parlait de l’Europe des douze et du Marché commun. En pratique, l’important était l’azote et l’acide phosphorique. C’était le début d’une prise de conscience des carences en magnésie, bore, molybdène et compagnie. Il faudrait en apporter dans les champs, parce que les terres s’appauvrissaient déjà. À ce moment, le bio ça n’existait pas pour nous. Je vivais avec mon père et ma grand-mère. Elle avait vécu les deux guerres, toujours à la ferme, on avait une basse-cour. On a toujours économisé, on ne gaspillait rien. C’était une ligne droite, j’étais né là-dedans, les choses, je n’avais pas besoin de les apprendre, je les voyais, je les faisais. Les vacances, je travaillais. C’était les fils qui reprenaient les fermes. C’était les trente glorieuses. Le lycée agricole, ça a été du bonheur. Ce que j’apprenais, je l’avais mis en pratique, alors c’était les deux doigts dans le nez. Mon père ayant pris sa retraite en 1998, c’est Babeth et moi qui prenions les décisions sur la ferme à cent pour cent, on produisait du melon, on avait un peu de poires et de pommes. C’était dans les années deux mille. On travaillait encore avec le MIN (Marché d’intérêt national) de Châteaurenard. Les « expéditeurs » nous achetaient nos produits : fruits, melons, salades. C’étaient des partenariats. On s’engageait verbalement à produire les quantités demandées et chaque fois, on se faisait avoir. Un été, on avait planté deux ou trois cents mille salades, Casino avait le débouché, il nous assurait un prix. Nous, on s’était engagé à couper la salade très tôt, à la livrer à 10 heures fraîche, pour qu’elle aille dans les magasins. Et d’un coup, ils n’ont pas tenu leurs engagements et ils ont fini par nous payer les salades 0,10 € pièce.
Babeth : Parce qu’elles étaient légèrement bordées, c’est-à-dire qu’il y avait une petite marque sur la première feuille. Et pour ça, ils ne les achetaient pas.
Claude : Je commence à détruire la production, à la broyer. Mon voisin chevrier me demande ce que je fais. Il avait eu le même problème avec ses fromages et il avait trouvé la solution. Il était rentré dans une AMAP (Association de maintien de l’agriculture paysanne). On est en 2006, ça démarrait. De 2000 à 2006, on a galéré, on a essayé toutes les solutions pour s’en sortir. On n’y arrivait pas.
Les AMAP ont démarré partout en même temps en France ?
Claude : Les AMAP ont démarré en premier avec le paysan Daniel Vuillon près de Toulon, à Ollioules en 2005. Après il y a eu Miramas. Une première charte des AMAP a été adoptée par « Alliance Provence » (réseau régional des AMAP) qui a déposé la marque AMAP. Une fédération s’est rapidement étendue à toute la France.
Babeth : Soit disant, c’était un effet de mode.
Claude : Je craignais, au départ, étant donné l’expansion très rapide, qu’on aurait des problèmes de la part de la grande distribution. En effet, on livre une marchandise sans poids, sans prix. C’est un volume de marchandises qui a un prix. On ne s’engageait pas sur un poids/prix, et on n’avait pas, d’après la législation, le droit de le faire. On a eu une dérogation obtenue par José Bové qui a poussé à la roue à l’époque. Les supermarchés n’y ont pas cru. Ils ont dit : « Laissez ce petit morceau d’os aux quatre petits paysans, ça leur fait plaisir de faire ça, laissez-les faire, ça n’ira pas plus loin que ça ». Et quand ils se sont aperçus que ça se développait fortement, alors ils ont créé un rayon bio.
Mais alors les AMAP à l’origine, c’était bio ou pas ?
Claude : « Alliance Provence », dont les paysans faisaient pratiquement tous partie de la Confédération paysanne avec José Bové, n’a pas voulu exiger la qualité « bio », pour ceux qui produisaient en AMAP. Alors les « Paniers marseillais » se sont créés parce que les gens ne s’y retrouvaient plus entre le bio et le non bio. La charte des « Paniers marseillais » a cinq exigences : production exclusivement bio, dans un rayon de soixante/soixante-dix kms autour de Marseille, les paysans livrent à Marseille, la production doit rester à taille humaine (pas plus de 250 000 euros de chiffre d’affaires annuel), le personnel local doit être déclaré en France. Pour pérenniser ce système, on a créé une commission. Chaque année, tous les samedis après-midi, de novembre à décembre, on faisait le tour des exploitations avec le président, des membres du CA et les producteurs, ceci pour voir si les directives étaient respectées. Ils sont venus chez moi, on allait chez tout le monde. On mangeait un bout ensemble, et on faisait le tour, et c’est devenu du conseil. Quand tu fais le tour de fermes comme ça, tu vois les différences et tu comprends pourquoi ça fonctionne ici et pas là. Babeth : Chaque agriculteur apportait, ça nous apprenait, c’était des échanges.
Vous vous êtes convertis au bio à quel moment ?
Claude : On s’est converti en janvier 2007. On a arrêté tous les pesticides. En janvier 2008, on a eu le premier contrôle avec la conversion. Et en 2009, on a eu le titre AB (Agriculture Biologique).
Cette conversion, c’était la pression des AMAP et des « Paniers marseillais » ?
Claude : La pression est venue d’abord du milieu familial. Quand je sortais pour aller épandre des pesticides, Babeth se plaignait : « Tu empoisonnes les autres ! » Un jour, elle me dit : « De toute façon, on n’arrive plus à payer les factures des pesticides, tu vas arrêter de mettre ces saloperies ! ».
Babeth : En fait, ça nous mangeait le budget.
Claude : Pour produire plus, il faut mettre de la chimie et puis la chimie, elle coûte de plus en plus cher.
Babeth : Il faut savoir que tous les fruits et légumes qui avaient un petit truc dessus n’étaient pas vendables. Ça il faut le savoir, on n’avait pas le choix.
Claude : Oui, et il n’y a pas que la faute des paysans. Le paysan, dans les années soixante, il a été dans un engrenage.
Tu veux dire que la grande distribution poussait aussi ?
Claude : Il y a des politiques et des lobbies au milieu, les firmes, les Bayer, les Monsanto, il y avait les Dupont de Nemours à l’époque. Quant à la place de mettre trente tonnes de fumier à l’hectare, tu n’as que vingt ou trente sacs d’engrais, quand à la place de désherber mécaniquement ou à la main, tu n’as qu’à mettre un litre de produit dans la machine, c’est beaucoup plus facile.
Babeth : On n’utilisait pas de personnel car Claude faisait tout le boulot. Mais on ne gagnait rien quand même.
Claude : Oui en conventionnel, tu as un gain de temps énorme. On faisait 350 paniers/semaine en bio avec cinq ouvriers, toi et moi. En conventionnel, on fait le même nombre à deux.
En bio le gros problème, c’est le désherbage. Ce que je ne croyais pas quand je me suis converti. Je pensais qu’on allait se faire bouffer par les pucerons, les araignées rouges, que ce serait l’enfer, la catastrophe, qu’on ne produirait rien.
Babeth : Quand on a pris la décision, on nous a dit : « ça ne marchera pas ». On avait tout le monde contre nous. Le maire de notre commune n’y croyait pas.
Claude : Oui, tout le monde. On avait des collègues qui produisaient déjà en bio. Ils étaient la preuve qu’on pouvait y arriver. Je n’y suis pas allé comme ça, mais je n’étais pas convaincu d’arriver à maîtriser tous les vers de poireaux, de carottes, etc. Mais on était coincés financièrement.
Babeth : On était à la limite de vendre.
Claude : Voilà, les pesticides, on avait bien compris que c’était plus possible, la vente dans la grande distribution, c’était plus possible non plus. Je dis bon : « On fait comment ? ». Je vais rencontrer les gens à une distribution de l’AMAP, ils nous disent : « Nous ce qu’on recherche, c’est que le produit soit bio, que notre argent, on le donne à celui qui travaille, qu’il y ait la proximité. Il faut ces critères. En revenant de Marseille ce jour-là, j’ai dit à Babeth : « Voilà, on va faire ça ».
Babeth : Il m’a dit : « Tu me suis ? Oui ? Qu’est-ce que je fais ? » Je réponds : « Oui, je te suis pour le meilleur et pour le pire. ». À partir de ce moment-là, on est entré dans une période compliquée parce qu’il fallait laisser les terres en jachère pendant trois ans pour la conversion en bio. Donc il n’y avait plus de rentrée d’argent.
Claude : La première année de conversion, ça a été une catastrophe. On a eu une année très, très difficile sur le plan financier. C’était terrible. On a mis tout en jeu pour passer ce cap. Là, on a eu de la chance car les « Paniers marseillais » acceptaient de monter des AMAP avec des producteurs en deuxième année de conversion. On a eu tout de suite des contrats. Lors des réunions, les gens nous demandaient quelles étaient nos difficultés. Elles étaient surtout financières, nous n’avions pas le fond de roulement et la banque ne nous faisait pas confiance. Alors les gens nous ont proposé de faire le chèque six mois à l’avance et on a pu instaurer ce système.
Babeth : Et d’avoir cet argent avant, ça change tout !
Claude : Ça permet de mettre en culture, le banquier ne te casse plus les pieds.
Attention, tu encaisses six mois, mais après il faut aller au bout des six mois. Il faut gérer, mais bon, tu as le fond de roulement, c’est déjà plus pareil.
Ça doit donner le sentiment d’être soutenu ?
Claude : Quand tu amènes ton fourgon de légumes, les gens t’attendent, ils t’aident à déballer, ils font la distribution, tu as le retour sur ce que tu as amené. Quand tu amènes des bons melons, des belles tomates, de belles pommes de terre ou des bonnes salades fraîches coupées du jour, tu as le retour. Et puis au bout d’un moment, ça devient des amis, et puis c’est plus des clients, tu as du sens.
Babeth : C’est aussi une reconnaissance du métier.
Claude : En livrant mes paniers, j’ai réfléchi autrement, je n’avais plus la même vision de l’agriculture et des choses en général avant et après. Avant, j’étais seul dans les champs, je ne voyais personne. J’avais les œillères du Crédit Agricole, de la Chambre d’Agriculture ou de la grande distribution. Celle-ci me disait : « il faut que les cerises soient noires, pas rouges ! Mais noires ! ». Tandis que là, après je suis libre (Babeth approuve), je discute avec différentes personnes de différents horizons, qui me disent leurs problèmes, et qui me font prendre conscience que je ne suis pas le seul à en avoir.
Babeth : Nous étions libres de faire nos cultures. Les adhérents ne nous disaient pas, la semaine prochaine, je veux des carottes… ils acceptaient tout. Il y avait de la concertation. On essayait toujours de répondre aux suggestions, mais ce n’était pas imposé.
Claude : Il fallait surtout semer à la bonne date. Par exemple, les melons, ici, ils se produisent facilement et ils sont bons du 10 juin au 20 juillet. Pour produire avant le 10 juin, il faut des serres, des plastiques… Pour produire au mois d’août, il faut arroser énormément, il faut planter en retard, il faut faire un tas de bordel, des frais en pagaille sur la culture, et ça, quelle que soit la culture, même de la courge ! Ce fonctionnement avec les AMAP nous a permis de semer aux bonnes dates comme le faisait mon arrière-grand-père, naturellement. On produisait à la date, et les « amapiens » consommaient des légumes de saison à la date où ils étaient produits. Il suffisait d’en avoir suffisamment pour avoir un beau panier pour qu’ils puissent manger la semaine. Là il faut prévoir les quantités, mais produire quand ça vient c’est plus facile.
Babeth : On est tributaire du climat.
Justement, le changement climatique, à quel moment vous l’avez ressenti ?
Claude : On l’a senti dans les années deux mille. On n’avait jamais vu des coups de soleil sur les melons, sur les aubergines, sur les poivrons. J’en ai apporté, aux distributions, des spécimens, pour faire voir !
Dans ce cas, la culture sous les arbres serait une solution ?
Claude acquiesce.
Babeth : Par rapport au réchauffement, il a fallu repenser la façon de planter.
Claude : Quand j’ai commencé à travailler en 1978 à temps plein sur la ferme, les arrosages aspersion existaient, mais on ne s’en servait pas. On ne risquait pas de mouiller une plante en pleine chaleur. Mais maintenant c’est préconisé.
Comment vous êtes-vous formé au bio ?
Claude : Ma grand-mère paternelle m’a transmis oralement les pratiques de son père : comment faire les semis, comment nettoyer une parcelle très sale en mauvaises herbes, par exemple en faisant deux années consécutives du blé semé à 200 kg à l’hectare au lieu de 150, afin d’étouffer les mauvaises herbes et en laissant la paille dessus. Quant aux vers « fil de fer » (ceux qui trouent les patates et même les goutte-à-goutte), je labourais la parcelle au mois de juillet précédant l’année de plantation. J’attaquais à neuf heures du matin et je m’arrêtais à 10 heures. Pourquoi ? Parce qu’en labourant en plein cagnard, je sortais le frais et après les vers se faisaient cogner par le soleil, ils n’avaient pas le temps de se ré enterrer.
Et les bons vers, ça ne les cognait pas aussi ?
Claude : Les bons arrivent à se sauver. Et si tu les casses en deux, ils en font deux. Et là, en faisant ça avec un bon assolement, en revenant tous les cinq ans dessus, j’arrivais à avoir des patates qui n’avaient pas de vers. Et ça, ça venait de mon arrière-grand-père.
C’est une forme de binage ?
Claude : On binait au ras des cultures. Ce binage élimine toutes les punaises, les vers fil de fer, toutes les saloperies qui piquent les choux. L’été ils se mettent à l’abri dans les fentes de dessiccation du sol et si tu bines, tu les crèves. On allait biner à 14 heures l’après-midi. Chaque culture a sa spécificité. Un bon binage vaut deux arrosages. L’eau remonte par capillarité dans le sol pour s’évaporer. En fragmentant la terre avec le binage, tu casses les voies de remontée de l’eau et celle-ci reste dans le sol. Avec le binage, tu enterres aussi toutes les bestioles qui attaquent les légumes et elles ne sortent plus après.
Tu pouvais faire des productions importantes ?
Claude : 350 paniers par semaine [1]. Les jeunes nous disent que nous sommes fous. Par exemple les carottes. C’est long une rangée. L’herbe pousse entre les carottes. Il faut y aller, au couteau, à genoux ou à quatre pattes pour arracher l’herbe sans toucher à la carotte.
Si on avance vers des questions plus générales, pense-tu que le bio puisse nourrir la planète ?
Claude : Pour que ce soit possible, il faut trois conditions : la première est d’arrêter le gaspillage. Dans les MIN et les grandes surfaces, il se jette beaucoup de marchandises. Par exemple, Auchan demande à un producteur bio de lui livrer x salades. Le producteur va en cultiver 2 x, au cas où il aurait un problème. Il va lui rester sur les bras une certaine quantité de marchandises pour laquelle il n’aura pas de débouchés. Le bio pour la grande distribution, je pense qu’ils en jettent 50 %. Un peu va dans la transformation, mais beaucoup est jeté. Ils ont tellement fait produire de bio qu’ils gèrent le stock par le formatage (aspect et calibrage). Ils ont contribué à des conversions en bio de très grosses exploitations qui y sont venues par les subventions et poussées par la grande distribution, mais pas par conviction. Ils ont surfé sur la vague. Actuellement, 36 % des fermes en bio ont disparu. Les toutes petites parce qu’elles ne s’en sortaient pas, les grosses déçues par la grande distribution, et à cela s’ajoutent les départs en retraite et la concurrence étrangère. Dans ce métier-là, tu as 40 % de chance de t‘en sortir si tu travailles. C’est la corporation où il y a le plus de suicides, et j’ai vu des gars qui, même en travaillant dur, ne s’en sortaient pas.
Après l’arrêt du gaspillage, quelles seraient les deux autres conditions pour que le bio puisse nourrir la planète ?
Claude : La deuxième condition, c’est de produire local. Cela permettrait aussi de réduire le transport et la spéculation. On est dans l’Europe du commerce... La troisième condition, ce sont les circuits courts.
Babeth : C’est les AMAP qui nous ont sorti d’affaire. Avec l’AMAP, tu vends au juste prix.
Que pensez-vous des subventions ?
Claude : Les subventions, je suis contre. Quand un travail est subventionné, ça le désorganise. Je ne me suis pas débrouillé pour en avoir. Il faut vivre de son travail, payé au juste prix. S’il n’est pas payé au juste prix, tu te décourages. Cette reconnaissance du travail est une des premières choses que mon père m’a apprises.
Babeth : Je trouve que les AMAP nous ont apporté beaucoup de bonheur. On a redécouvert notre métier. C’était un gros travail, on arrivait à la distribution crevés, mais on repartait plein d’énergie, du fait des échanges, de la convivialité : on faisait visiter nos cultures, chacun apportait quelque chose, on partageait un pique-nique, on faisait de la musique, on passait la journée ensemble. Pourtant, c’est un métier difficile, on n’a aucune photo de vacances avec les enfants.
Claude : Je ne pouvais pas rester à la maison si je savais qu’il fallait faire quelque chose tout de suite pour sauver le panier six mois plus tard. Une anecdote : une année, un orage de grêle a détruit la récolte de pommes, on les a récupérées pour faire de la compote pour payer les saisonniers, puis on est allé emprunter à la banque, on a mis cinq ans à rembourser. Si ça arrive une fois, deux fois, trois fois, le paysan est obligé de vendre. Ça, je ne le ressens plus en AMAP. C’est un apaisement. Au bout de cinq ans, je me suis dit : « Il ne peut plus rien m’arriver, j’ai les gens avec moi, je n’ai plus peur. »
En conclusion, qu’est-ce que vous aimeriez dire aux jeunes qui s’installent, comme paysans avec l’AMAP ?
Babeth : Il faut foncer, on peut vivre, on a les gens avec nous.