Isabelle Canil
Orthophoniste
Dans Le roman de Louise, d’Henri Gougaud, je lis page 41 de l’édition de poche : « Il est des familles de femmes qui passent de pleines journées plantées debout, les jambes nues, dans l’eau grise des bords de Seine. Qu’attendent-elles ? Des sangsues. Quand elles en ont la peau couverte, elles courent les apothicaires qui leur en donnent presque rien après avoir, la pince aux doigts, compté les bestioles une à une. »
On est en 1855 et Louise Michel découvre Paris. Elle voit les immenses chantiers où l’on rase des ruelles entières de taudis, pour construire à leur place de beaux immeubles, sous la direction du préfet de la Seine, le baron Haussman. Ils seront chers, les loyers de ces beaux appartements…
Mais il subsiste des quartiers où règne la misère qui engendre la débrouille désespérée et « les petits métiers ». Pêcheuse de sangsues en est un. Il fut un temps où la sangsue était très prisée en pharmacopée, elle remplaçait la saignée, celle qu’on pratique dans les pièces de Molière. Il existait même un cours de la sangsue, car elle pouvait se vendre très cher selon sa grosseur ! Pour sa récolte, on utilisait aussi des chevaux qu’on poussait dans les marécages afin que les bestioles s’y agrippent comme des ventouses. Ils finissaient par en crever dit-on.
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- Mais quand Louise Michel arrive à Paris, ce ne sont pas des chevaux qu’elle voit, mais des femmes…