La récolte

Isabelle Canil
Orthophoniste

Dans Le roman de Louise, d’Henri Gougaud, je lis page 41 de l’édition de poche : « Il est des familles de femmes qui passent de pleines journées plantées debout, les jambes nues, dans l’eau grise des bords de Seine. Qu’attendent-elles ? Des sangsues. Quand elles en ont la peau couverte, elles courent les apothicaires qui leur en donnent presque rien après avoir, la pince aux doigts, compté les bestioles une à une. »

On est en 1855 et Louise Michel découvre Paris. Elle voit les immenses chantiers où l’on rase des ruelles entières de taudis, pour construire à leur place de beaux immeubles, sous la direction du préfet de la Seine, le baron Haussman. Ils seront chers, les loyers de ces beaux appartements…

Mais il subsiste des quartiers où règne la misère qui engendre la débrouille désespérée et « les petits métiers ». Pêcheuse de sangsues en est un. Il fut un temps où la sangsue était très prisée en pharmacopée, elle remplaçait la saignée, celle qu’on pratique dans les pièces de Molière. Il existait même un cours de la sangsue, car elle pouvait se vendre très cher selon sa grosseur ! Pour sa récolte, on utilisait aussi des chevaux qu’on poussait dans les marécages afin que les bestioles s’y agrippent comme des ventouses. Ils finissaient par en crever dit-on.

    1. Mais quand Louise Michel arrive à Paris, ce ne sont pas des chevaux qu’elle voit, mais des femmes…

par Isabelle Canil, Pratiques N°80, février 2018

Lire aussi

N°80 - janvier 2018

Edito : La traque

par Sylvie Cognard
Sylvie Cognard Médecin retraitée Combien celui-là ? 500 dollars Et celle-là ? 350 dollars Et le petit là, c’est son gosse ? Oui Combien ? 200 dollars Je te prends les deux pour 400. Top là pour …
N°80 - janvier 2018

Philippe Bazin, photographe

par Philippe Bazin
Christiane Vollaire et moi-même avons, en février 2016, réalisé en commun un travail au camp de Calais. Les photographies présentées dans les pages intérieures de ce numéro de Pratiques résultent du …
N°80 - janvier 2018

La privatisation du vivant

par Céline Lafontaine
Céline Lafontaine Professeure agrégée de sociologie à l’université de Montréal, auteure notamment de L’empire cybernétique. Des machines à penser à la pensée machine (Seuil 2004) et de La société …
N°80 - janvier 2018

Une intégrité dangereuse…

par Philippe Pascal
Philippe Pascal Inspecteur à l’URSSAF Pratiques : Parlez-nous du combat que vous avez mené… Philippe Pascal : Mon père était journaliste à La Marseillaise, journal communiste. J’ai été élevé dans …