Serge Sadois
Retraité actif
Aïe ! Aïe ! Aïe ! Mes entrailles me jouent encore des tours.
On ne va pas en rester là, il faut prendre des décisions sur mon dossier, commençons par le CHU, puis des examens à la clinique et après ça, nous aviserons.
Quatre mois plus tard, rendez-vous avec un spécialiste chef à 14 heures dans son service du CHU.
C’est un centre hospitalier à l’ancienne, installé au centre-ville, donc un déplacement pas si simple, c’est-à-dire autoroute encombrée, péage engorgé, périphérique bloqué et pour se garer en centre-ville à 14 heures… à part une prière à Saint-Parcmètre, je ne vois rien d’autre. Bon ! En partant en milieu de matinée pour arriver un peu en avance dans la salle d’attente, c’est jouable. Celle-ci, commune à plusieurs consultations, est bien pleine, une chaise sur deux a été enlevée – conditions sanitaires obligent –, mais vu l’affluence, l’espace libéré est occupé par des gens debout, avec une personne sur deux semant du virus sur la tête de ses voisins. Il en dit quoi, le protocole ?
Plus tard, installé dans son bureau face à moi, le chef spécialiste regarde mon dossier qu’il avait déjà reçu, me pose deux ou trois questions, tapote sur son clavier et puis enregistre ses conclusions. À un moment, j’ai voulu demander une chose ou deux : « Attendez, je réfléchis ! ». Ah oui, c’est vrai ça ! Je ne vais pas déranger un cerveau qui travaille surtout que, derrière son masque, je vois bien que ce n’est pas le festival du sourire. Enfin, sans qu’il se lève de son siège, il me tend la lettre qu’il vient d’imprimer, répond brièvement à quelques questions et me donne le congé, sans bouger ni sourire, tel un mandarin inaccessible qui distribue son savoir… et c’est tout.
Pas vraiment tout, parce que j’avais juste oublié, sot que je suis, qu’avec les restrictions les restaurants étaient fermés et que pour déjeuner, je devais subir la trilogie périf-autoroute-péage.
Quelques jours plus tard, la suite de l’examen de mon dossier devait se passer dans une clinique de la périphérie pour avoir l’interprétation de quelques scanners et IRM, consultation prévue par visio. Pour ça, j’ai utilisé mon ordinateur installé au milieu de mes papiers, livres et autres bricoles qui traînent. Confortablement installé dans mon fauteuil, à l’heure dite (ou presque), j’ai pu longuement discuter avec une jeune dame qui était, chose extraordinaire, sans masque et, en plus, avait un magnifique sourire et ça, par les temps qui courent, c’est rare.
Alors pour moi, perdre des heures pour aller voir de près une personne coincée derrière un bureau ou voir, de loin, un humain souriant derrière un écran, le choix est assez vite fait.