Obligation ou nécessité sanitaire ?

Edito

Comment agir face aux réticences persistantes d’une partie de la population à l’obligation vaccinale ? La balance bénéfice-risque des vaccins contre la Covid-19 est plutôt favorable en termes de prévention des formes sévères de la maladie, mais aussi de la transmission du virus. Objectivement, la vaccination généralisée s’impose comme une obligation morale et solidaire à l’ensemble de la population, aux peuples du monde et aux soignants en premier lieu.
L’objectif d’atteindre une immunité collective n’est pas un problème individuel ou doctrinal, mais un enjeu politique global. La vaccination dans ce contexte n’est donc pas une option, mais un enjeu de santé publique. C’est par la poursuite d’une information de qualité, par un travail d’écoute des inquiétudes et d’explicitation, que nous pourrons encourager nos concitoyens, et en particulier nos collègues, à se faire vacciner au plus vite.
Car les réticences, malgré la montée d’une quatrième vague, s’appuient sur des raisons multiples et tout à fait compréhensibles : la gestion erratique de cette crise par l’État, ses insuffisances, ses mensonges, l’instrumentalisation de l’épidémie par ceux qui choisissent de nous gouverner par la peur n’ont fait qu’ajouter du doute au doute. Cette gestion autoritaire a laminé la confiance de la population et en particulier celle des soignants qui, après avoir fait front dans des conditions extrêmement difficiles, sont ostracisés du fait de leur réticence à se faire vacciner. La défiance envers ce nouveau vaccin s’inscrit dans un rejet plus général vis-à-vis des institutions, des décideurs, des politiques et, en particulier, de la question du profit qui domine les objectifs des laboratoires producteurs de vaccins. Les responsabilités de l’État sont écrasantes dans le développement de cette défiance.
Autre motif de mécontentement, le gouvernement fait le choix de la contrainte et de l’obligation légale pour obtenir une « adhésion » à son programme de vaccination, alors que certaines populations n’ont pas été prises en compte dans la stratégie vaccinale. Les plus pauvres, les malades et les personnes âgées isolées devraient faire l’objet d’une campagne spécifique et ciblée.
La menace de suspendre les salaires des soignants qui ne se feraient pas vacciner est inconcevable, surtout dans le contexte actuel où les hôpitaux, les centres de vaccination manquent de personnel suite à leur épuisement et aux nombreuses démissions qui affectent tous les hôpitaux.
L’obligation d’un pass sanitaire européen couronne le tout entraînant encore davantage de discriminations chez ceux qui ne peuvent être vaccinés pour des raisons de santé, mais également pour les gens vaccinés à l’étranger qui ne peuvent obtenir ce pass.

Nous nous associons à la campagne pour obtenir la levée des brevets sur les vaccins, seule possibilité de doter les pays pauvres des mêmes moyens de lutte contre cette pandémie sans frontières, mais aussi contre les prochaines…

Pratiques N°94, août 2021

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