Indécences

Les politiques de santé sont totalement liées à l’actualité politique et économique, dont elles sont un des symptômes. A l’heure où nous mettons sous presse, la une des journaux, abreuvée du vocabulaire de la crise, est inondée du récit des caprices et de l’échec des footballeurs de l’« équipe de France », après l’avoir été des relations des milieux du sport d’abord au dopage, puis à la prostitution. Comment ne pas être scandalisé par l’indécence des sommes dépensées pour leurs frais d’hôtel, transports, salaires et primes, au moment où de plus en plus de nos concitoyens se retrouvent à la rue faute de ressources ?
Dans le même temps apparaît au grand jour que l’épouse d’un ministre d’Etat chargé du budget est soupçonnée d’avoir organisé l’évasion fiscale d’une des plus grandes fortunes de France, alors que son mari présente un plan de réforme des retraites imposant, au nom du bien public, une politique d’austérité qui signifie pour beaucoup le basculement dans la précarité. Un an plus tôt, une ministre de la Santé offrait des sommes colossales à des laboratoires pharmaceutiques pour une campagne de vaccination sans objet, tout en stigmatisant le mythique « trou de la Sécu » qui sert de justification à une restriction budgétaire sans précédent compromettant l’accès aux soins des plus fragiles.
Ces scandales ne concernent pas une de ces républiques bananières dont la corruption est supposée inscrite au patrimoine mondial de l’humanité. Ils sont le quotidien de la France dont le président élu a célébré son accession au titre sur un yacht affrété par l’un des bénéficiaires patentés des trafics de la Françafrique. Du dopage à la prostitution, de la destruction des politiques de santé publique à la corruption, l’actualité ne cesse de montrer les effets de ces pratiques sur la dissolution des solidarités. Quel sens y a-t-il à appeler à la « responsabilité citoyenne » sur les retraites en favorisant l’évasion fiscale, à encenser l’« éthique du sport » en couvrant d’or ses protagonistes, à parler de santé publique en donnant carte blanche aux entreprises pharmaceutiques, à prôner l’égalité en mettant en place toutes les discriminations ?
Pratiques, au nom même des exigences de la santé publique, invite les citoyens à tirer la leçon de ces évènements, à résister partout où c’est possible à la dénaturation des institutions, à la dégradation des liens sociaux, à la destruction des services publics au profit d’intérêts contraires à ceux du bien commun. Si crise il y a, c’est d’abord le fait de l’indécence des comportements de ce qui tend à devenir une caste politique, et ne cesse, dans un contexte international violent, de favoriser les abus des prédateurs financiers qui l’ont provoquée.


Pratiques N°50, octobre 2010

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