S’il est un domaine parmi les évènements de la vie qui a été largement transformé par l’évolution des techniques biomédicales et les changements sociaux, c’est bien celui de la venue au monde des enfants.
A l’origine, le désir amoureux n’est pas forcément celui d’engendrer et on peut avoir des enfants sans passer par l’acte sexuel.
La contraception permet à la femme de vivre sa sexualité et de disposer de son corps librement, et la légalisation de l’interruption volontaire de grossesse permet de mettre fin à une grossesse non désirée. D’autres couples peuvent procréer grâce à la plus haute des technicités ou font le choix de l’adoption. Les pères tentent de trouver leur place...
Le mythe de l’enfant parfait plane au-dessus de la surveillance de la grossesse qui devient de plus en plus contrainte par des interdits et des injonctions médicales moralisantes.
L’accouchement lui-même est devenu un acte médical, voire même chirurgical avec l’augmentation du taux de césariennes. Il est de plus en plus souvent provoqué, les risques qui s’y rapportent ont changé de nature. Des psychiatres, confrontés à des enfants en souffrance, questionnent les effets anxiogènes de la médicalisation du suivi de grossesse et les conditions de l’accouchement médicalisé.
Le médecin généraliste, après avoir été écarté du suivi des femmes enceintes, est de nouveau appelé à travailler en réseau par des maternités débordées ne pouvant plus assurer le suivi des femmes.
Les relations entre les différents corps professionnels, gynécologues accoucheurs, sages-femmes, médecins généralistes oscillent selon les endroits entre affrontements de pouvoir, suprématie hiérarchique et rancœur, entre adaptation pragmatique à la pénurie et vraie envie de travail d’équipe.
Deux conceptions s’affrontent : d’une part, la pression de la rentabilité, la fermeture des petites maternités, la fascination pour les protocolisations rendent plus technique le suivi de grossesse ; d’autre part, une partie des professionnels impulsent un tournant radical dans les pratiques et les modes de pensée autour de la femme enceinte et du nouveau-né en apprenant à travailler en réseau transdisciplinaire, en prenant appui sur l’entourage non médical et sur une écoute attentive des femmes, des hommes et des couples.
N°50 - août 2010
— Dossier : Mettre au monde
Pratiques N°50, octobre 2010