Grâce aux aides-soignants ?

Olivier Boitard
Psychiatre, membre de l’Union syndicale de psychiatrie (USP)

En entrant dans le pavillon réservé à des malades présentant de lourdes difficultés psychiques, je croise Valentin en compagnie d’une patiente. Il m’explique qu’il doit aller chercher des résultats d’examens au laboratoire et qu’il en profite pour emmener Madame N. « faire un tour ». Elle n’est pas capable de sortir seule. Ce petit geste marque de la bienveillance, mais aussi de l’intelligence en transformant un acte de peu d’intérêt en un soin.
Valentin fait partie de ces aides-soignants qui ont véritablement choisi leur métier et en particulier n’ont pas souhaité devenir infirmiers. Essentiellement pour organiser des activités variées avec les patients et créer une vie institutionnelle. Par exemple, en organisant des sorties quotidiennes ou des séjours d’une semaine.
Comment les financer quand on ne peut plus compter sur l’établissement ? En organisant des ventes auxquelles participent les patients : une friperie (approvisionnée par des dons) qui assure en même temps la vêture pour des patients démunis ; des confitures élaborées en commun dans le pavillon ; des petits objets d’artisanat entièrement fabriqués par les patients ; et bien d’autres activités encore.
Les séjours, encadrés par des infirmiers et des aides-soignants, accueillent des patients aux comportements parfois étranges et sont variés : bord de mer, randonnées en montagne et dernièrement visites des châteaux de la Loire. Quelques accrochages parfois (au cours d’une visite, une patiente attrape un gros paquet de prospectus et refuse de le rendre), mais diplomatie et persévérance permettent de retrouver la sérénité.
En ces temps difficiles où le personnel hospitalier a de moins en moins de temps à consacrer aux patients, les aides-soignants en psychiatrie sont indispensables pourvu qu’ils connaissent bien les hospitalisés, qu’ils aiment leur métier et que l’encadrement leur permette de l’exercer.
Encore un psychiatre qui parle à la place des autres, m’objectera-t-on ? J’avais souhaité leur laisser la parole – par exemple au cours d’un entretien – mais pour ce numéro manquent l’espace et le temps. Sûrement dans un prochain Pratiques.


par Olivier Boitard, Pratiques N°85, avril 2019

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