Ernest Pignon-Ernest, photographe

Philippe Bazin
Photographe

Ernest Pignon-Ernest est niçois, il vit et travaille à Paris.

Depuis presque cinquante ans, il appose des images sur les murs des cités. Comme il le précise « … au début il y a un lieu, un lieu de vie sur lequel je souhaite travailler. J’essaie d’en comprendre, d’en saisir à la fois tout ce qui s’y voit : l’espace, la lumière, les couleurs… et, dans le même mouvement ce qui ne se voit pas, ne se voit plus : l’histoire, les souvenirs enfouis, la charge symbolique… Dans ce lieu réel saisi ainsi dans sa complexité, je viens inscrire un élément de fiction, une image (le plus souvent d’un corps à l’échelle 1). Cette insertion vise à la fois à faire du lieu un espace plastique et à en travailler la mémoire, en révéler, perturber, exacerber la symbolique… ».

Le moment fondateur de son œuvre, après quelques années d’ébauches remarquables, reste l’intervention à Nice en 1974 alors que la ville vient d’être jumelée avec la capitale de l’apartheid, Le Cap. Pour protester contre la célébration de ce jumelage organisée avec l’équipe de rugby d’Afrique du Sud à Nice, il appose durant la nuit des affiches grand format d’une famille de noirs enfermés derrière des barbelés.

La photographie prend alors toute sa force dans son œuvre par ce geste de solidarité et de protestation. C’est sur cette mémoire que se fonde alors son travail à Soweto et Durban présenté ici dans Pratiques.

Pierre Barbancey précise : « Pignon-Ernest extirpe les images de la révolte de Soweto du 16 juin 1976. Une manifestation d’écoliers et de lycéens noirs réprimée dans le sang par la police blanche de l’apartheid. Une photo fera le tour du monde, celle de la mort de Hector Petersen, 12 ans, que l’on voit sans vie dans les bras d’un homme. Cette scène si forte et si douloureuse pour l’Afrique du Sud, Ernest Pignon-Ernest va la reprendre en la transformant »…

Au-delà de la maladie, le sida, et au-delà de l’image d’un enfant mort dans les bras de sa mère, le geste d’Ernest Pignon-Ernest montre comment la dignité d’un être humain architecture le dessin. Collées sur les murs de Soweto et de Durban, les sérigraphies sont ensuite photographiées pour mémoire, pour archive, mais ces photographies déploient aussi toutes leurs qualités plastiques. Ainsi, les deux images résonnent entre elles, affirmant le geste d’inclusion solidaire, de volonté de participation au destin des gens, qui sous-tend toute l’œuvre d’Ernest Pignon-Ernest.

Actualité :
Grande rétrospective à Nice :
Exposition au Musée d’Art Moderne et Art Contemporain
du 25 juin 2016 au 8 janvier 2017

Projection de films à l’auditorium du MAMAC
Samedi 1er octobre de 15h à 17h
– « Naples revisitée, 1988 », 30′ – de Patrick Chaput et Laurence Drummond
– « La Pasqua secondo Ernest Pignon-Ernest », 2014, 28′ – du Collectif Sikozel
puis de 18 heures à 21 heures
– « SeTorno, Ernest Pignon-Ernest et la figura di Pasolini » 2016 – du Collectif Sikozel
« Extases » à l’église de l’abbatiale Saint-Pons du 25 juin au 2 octobre 2016 du mercredi au dimanche de 15h à 18 heures

www. http://pignon-ernest.com


par Philippe Bazin, Pratiques N°74, juillet 2016

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