Marie Kayser,
médecin généraliste
Un rapport récent de l’IRDES [1] fait le point sur l’accessibilité spatiale au regard des distances et du temps d’accès aux soins les plus proches en ville et à l’hôpital.
95 % de la population française accède en moins de quinze minutes à des soins de proximité (généralistes, infirmiers, kinésithérapeutes, dentistes). Moins de 1 % de la population est à plus de quinze minutes de trajet d’un généraliste : dans les zones rurales et montagneuses, principalement en Corse, Auvergne, Champagne Ardenne. Les généralistes de secteur 2 (à dépassements d’honoraires), peu nombreux, sont surtout dans les grandes villes.
La plupart des spécialistes libéraux sont accessibles en moyenne à moins de vingt minutes. Ils sont surtout concentrés dans les espaces identifiés comme pôles et en leur centre.
Les mêmes régions cumulent éloignement des soins de proximité et des spécialistes libéraux. Quand l’accès géographique aux spécialistes est plus difficile, ceux-ci sont plus fréquemment en secteur 2, dans les zones rurales comme urbaines telle que l’Ile-de-France.
Les régions concernées par les temps de trajet les plus longs varient selon la spécialité hospitalière, mais quelques régions sont concernées pour toutes les disciplines : Champagne-Ardenne, Bourgogne, Franche-Comté, Midi-Pyrénées, Auvergne, Limousin et Corse.
Plus la spécialité est rare, plus les spécialistes sont concentrés dans les espaces urbains importants, mais ce ne sont pas toujours les mêmes régions qui sont défavorisées en soins hospitaliers et en spécialistes de ville.
Pour tous les types de soins, le temps de parcours est plus élevé en périphérie des pôles et pour les bassins de vie des bourgs et petites villes.
Depuis 1990, la distance d’accès aux soins a augmenté pour les pédiatres, les psychiatres, les généralistes, les ORL, dentistes et gynécologues-obstétriciens en libéral. Elle est restée stable pour les infirmiers et les radiologues, alors que leur nombre a augmenté. Les communes pour lesquelles on observe une augmentation de la distance d’accès aux soins présentent un dynamisme démographique relativement faible.
Entre 2000 et 2006, on a assisté à la fermeture de 17 % des maternités avec une forte disparité au sein des régions.
De nombreuses questions se posent auxquelles ce rapport n’apporte pas de réponses, mais qu’il liste pour partie :
— Quelle offre réellement disponible ? Nombre de soignants, temps de travail, permanence des soins... ; un regroupement de professionnels accueillant la population du secteur offre une accessibilité plus grande qu’un soignant proche refusant de nouveaux patients. Les remplaçants ne sont pas pris en compte, alors que leur rôle est important dans l’offre de soins.
— Quelle capacité des soignants et des patients à se déplacer : visites, consultations de spécialistes dans des pôles médicaux de premiers recours excentrés, ou dans des hôpitaux de proximité (qui sont en train de fermer) ; réseau de transport en commun, transports sanitaires (de plus en plus restreints, mais dont on pourrait imaginer l’extension sur des critères géographiques et de faible mobilité des patients) ?
— Quelle accessibilité financière ? Question fondamentale par rapport aux inégalités sociales. Ce rapport ne donne que très peu d’informations sur la répartition des spécialistes selon les secteurs conventionnels, il ne différencie pas hospitalisation publique et privée, cette dernière s’accompagnant le plus souvent de dépassements d’honoraires. Et il ne prend pas en compte les consultations hospitalières de secteur 1 qui jouent un rôle dans l’offre de soin accessible.
Pour juger de l’accessibilité réelle aux soins, il faudrait des données sur les délais du recours possible aux soins adaptés au problème de santé (maladie chronique, urgence, suivi de grossesse, accouchement, médecine de premier recours, spécialiste...) et disposer d’une cartographie des possibilités de soins à tarifs opposables sur tout le territoire...