A l’occasion du Congrès 2010 du SMG,
Ils évoquent leur découverte du SMG, leurs attentes à son égard, sa position très particulière au sein du syndicalisme médical qui, tout en défendant ses adhérents, met la situation sociale des patients au cœur de ses préoccupations.
MD : Je suis médecin généraliste, exerçant à Paris 20ème, en cabinet de groupe avec un associé, installée depuis 1992.
BG : Contrairement à mes collègues, je suis, depuis 2007, par choix, médecin salariée : pour un mi-temps, une consultation de médecine générale au COMEDE (Comité médical pour les exilés), l’autre mi-temps partagé entre une consultation de pédiatrie en hôpital à Aulnay et une consultation pour voyageurs à Avicenne.
ML : Je suis née dans la marmite. Je me suis installée en 1987 dans un cabinet de "vieux" du SMG, que je connaissais déjà parce que je militais pour l’avortement, et qu’ils avaient animé le MLAC. Ils étaient connus comme « cabinet de gôche » dans la banlieue. Ils avaient créé la revue Prescrire et il y avait Pratiques dans la bibliothèque.
VL : Je suis médecin généraliste, installé depuis 6 ans au Poiré sur Vie (Vendée), en semi-rural et cabinet de groupe (3 associés et une collaboratrice présente depuis deux ans)
MD : Par une de mes connaissances, le Dr Elisabeth Maurel-Arrighi, mais j’ai d’abord commencé par la lecture de Pratiques, vers 1998. J’étais inscrite à MG FRANCE. Ce n’est qu’en 2006 que j’ai adhéré au SMG, tout en conservant mon affiliation à MG FRANCE, du moment que la double appartenance était possible.
BG : Comme Mady, j’ai d’abord connu Pratiques, puis c’est tout naturellement, compte tenu des positions du SMG diffusées par la revue, que je me suis récemment inscrite au syndicat : les idées que ce dernier défendait – sur l’accès aux soins, les franchises, l’évaluation – me convenaient, m’intéressaient.En tant que salariée à l’hôpital, je pense également me syndiquer à la CGT, pour être en contact avec une plateforme plus large et plus diversifiée de professionnels. Je pense que cela peut être complémentaire et synergique par rapport aux positions défendues par le SMG.
VL : Des collègues autour de moi en font partie. Les positions du SMG qui, sans omettre la défense de la profession, dépassent le seul corporatisme professionnel, me conviennent bien. Ce qui n’est pas pour me déplaire, soucieux dans mon quotidien professionnel de l’efficience du système de Santé (au service, autant que possible, des patients) . Cela étant, comme Mady, j’ai la double affiliation, MG FRANCE et SMG.
ML : J’avais une prévention vis-à-vis du syndicalisme libéral, j’avais très peur du corporatisme dans un milieu où je ne me reconnaissais pas. Alors j’ai fait surtout de l’associatif, je me suis beaucoup investie dans la formation continue et les réseaux. J’étais installée depuis 15 ans, quand un de mes collègues, plus jeune que moi, a dit : « ce week-end je vais au congrès du SMG ». J’ai pensé : « et pas moi ? » et j’y suis allée. C’était en 2002 ou 2003. J’ai l’impression d’avoir rejoint ma famille.
MD : je pense qu’il n’y a pas lieu de hiérarchiser. Nous devrions nous retrouver sur de grands thèmes transversaux. Prenons l’accès aux soins : le secteur 2 tourne à l’horreur, on a du mal à trouver des spécialistes ne pratiquant pas les dépassements d’honoraires, ceux-ci sont tarifés en fonction des Complémentaires des patients, 25% de nos patients ont, à un moment ou un autre, renoncé pour ces raisons à se faire soigner.
ML : Le SMG pose les vrais problèmes de l’organisation du système de soins et il défend un système solidaire pour plus d’égalité du point de vue du droit à la santé. C’est évident que ce que vivent les patients influe sur nos conditions de travail, et nous avons une place dans la société qui doit servir à changer les choses
MD : le paiement à l’acte ! J’y prends un intérêt personnel et suis vraiment à la recherche de formules permettant d’en sortir.
BG : Je me suis assez naturellement tournée à la fin de mes études vers un exercice en mode salarié. Je pense aussi que le paiement à l’acte est contre productif dans la majorités des cas. Il faut vraiment réfléchir à d’autres modes de rémunération.
ML : Il y a eu l’option de médecin référent, qui permettait le tiers-payant et était déjà un paiement à la capitation, avec un forfait par patient. Le CAPI est un leurre qui impose des critères contestables et nous demande de modifier nos pratiques à l’insu des patients. Les Nouveaux Modes de Rémunération proposés en ce moment par les ARS sont peut-être plus intéressants, car c’est un travail pluriprofessionnel sur des objectifs choisis collectivement et un forfait pour de nouvelles activités à mener collectivement..
MD : en fait, l’une des raisons de ma participation au Congrès est que j’en attends justement des informations sur ces modes de rémunération alternatifs au paiement à l’acte.
MD : je dirais les modes d’exercice collectif de notre métier : Maisons, Pôles de santé. C’est également du Congrès que j’attends des informations nouvelles sur ces projets. D’autant plus que, dans mon esprit, ces structures entraînent aussi avec elles l’abandon du paiement à l’acte.
BG : je rajouterais bien, pour ma part, la psychiatrie. Le SMG doit avoir des choses à dire sur les dérives sécuritaires dont elle fait l’objet. [3]
VL : pour moi, le thème qui devrait se situer à l’amont de tous les autres, celui qui devrait motiver prioritairement le SMG, c’est d’explorer des formules remettant le patient au centre du système de soins, alors qu’il est, aujourd’hui, sous tutelle de nous, médecins, « qui savons ». Ceci ne peut se faire sans retrouver une conscience « citoyenne » : chacun devrait être acteur de l’organisation du système de soins. Rien ne se fera tant que le patient ne sera pas traité comme un adulte. On oublie trop souvent que sans le malade, il n’y a pas de médecin ! Si je vais au congrès, c’est aussi et surtout pour écouter, m’informer sur ce que le SMG a à dire là-dessus, les expériences à transposer.
MD : ce qu’il y a d’intéressant c’est que ces thèmes du SMG, minoritaires il y a quelques années, sont devenus à présent constitutifs de « l’air du temps » ! Notamment chez les jeunes médecins. Et cela est en rapport avec l’entrée de l’enseignement de la médecine générale dans les Facs. Dispensé par des praticiens, il a changé l’image de cette médecine chez les jeunes.
ML : En effet, et nous cela nous a permis de connaître des jeunes médecins que nous n’aurions jamais rencontrés. Ils sont bien mieux formés que nous l’étions et ils s’engagent vraiment dans leur métier, tout en étant très ouverts à la participation à la formation continue et au travail en réseau. Mais résisteront-ils à la lourdeur des journées de travail et des tâches administratives ? Le SMG est peut-être plus un mouvement politique qu’un syndicat, mais il défend les droits des patients autant que ceux des médecins. On n’a pas le choix, en étant dans un milieu aussi réactionnaire, il faut poser les questions politiques, sinon on perd son temps.
VL : Je considère intéressante cette ouverture du SMG à MG FRANCE (ou l’inverse d’ailleurs). Il me semble que c’est en rassemblant les forces vives sur une base commune que nous réussirons à améliorer les choses. Par ailleurs, je crois que si l’activité syndicale doit se nourrir de réflexion, elle ne peut s’affranchir d’actions concrètes à même d’apporter des solutions pratiques, palpables (le SMG ne devrait pas qu’être un “think tank”).
MD : je suis assez d’accord et ma double affiliation l’illustre.
BG : pas d’avis sur la question, peut-être du fait de ma situation particulière de médecin salarié par rapport à vous trois ?
ML : Je sais que beaucoup de médecins ont la double appartenance, la discussion avec MG FRANCE est toujours intéressante. J’ai rencontré des responsables de MG FRANCE qui m’ont semblé être sur la même longueur d’onde que nous (en tout cas sur l’accès aux soins) mais je ne sais pas jusqu’où ils peuvent aller, avec une base quand même très corporatiste. Mais je tiens à la spécificité du SMG, on a vraiment besoin d’un endroit où discuter, réfléchir ensemble et élaborer des actions et des projets qui aident à changer les choses. En médecine, on est à l’âge de pierre de la démocratie, en tout cas en ce qui concerne le pouvoir laissé aux patients.