C’est l’histoire d’une aventure humaine, avec ses doutes, ses élans, ses frustrations et ses colères.
C’est l’histoire d’une aventure politique, autour des thèmes de l’accueil, de l’hospitalité, de la solidarité, mais aussi d’une organisation autogestionnaire.
C’est l’histoire de jeunes migrants, très jeunes parfois, africains pour la plupart, tous exilés à la recherche d’un point de chute pour démarrer une nouvelle vie en France, après des trajectoires variables, déchirantes, dramatiques parfois, douloureuses souvent, pleines d’espoir toujours.
C’est l’histoire d’un quartier, connu par ces luttes, qui a su accueillir ces jeunes, leur donner quelques clefs, les guider dans les dédales administratifs de l’asile.
C’est l’histoire de personnes militant autour de ces jeunes, pour leur dignité.
C’est l’histoire du Squat Maurice-Scève, un ancien collège désaffecté, qui de l’automne 2018 à l’automne 2020, a réussi à s’organiser autour de ces jeunes, dont le nombre a atteint 450, et qui ont tous, lors de l’évacuation, pu être relogés, chose assez rare pour être soulignée.
Ce livre tente de décrire les différentes étapes de cette aventure, ses différentes facettes, de l’organisation de base pour le quotidien (dormir, se nourrir, se vêtir, se soigner, apprendre) aux combats politiques pour les rendre visibles et que nul ne les oublie là-haut sur la colline de la Croix-Rousse. Il est aussi fait de témoignages, ceux des jeunes et de leurs soutiens, souvent bouleversants, ils sont accompagnés de documents et photos.
Ce livre c’est aussi l’histoire qui se prolonge, celle d’une aventure humaine qui ne s’arrête pas à l’évacuation de ce squat, car rien n’est réglé pour l’accueil de ces exilés. Partout sur le territoire des lieux informels s’ouvrent pour ne pas les laisser à la rue. Le « squat sur un plateau » est une étape importante pour le quartier de la Croix-Rousse et pour Lyon, mais aussi partout où le mot solidarité a encore un sens.
En vente dans toutes les librairies, ou en commande auprès du collectif à l’adresse suivante : lecollege@riseup.net, l’argent récolté sert aux MNA (Mineurs non accompagnés) dont nous avons la responsabilité en termes d’hébergement en attendant la reconnaissance de leur minorité.
- « Ils arrivent
Ils ont 13, 14, 15 ans
Ils arrivent
Recroquevillés de froid et de fatigue
Ils arrivent
Ils ont 14, 15, 16 ans
Ils arrivent
Le dos plein du voyage
Ils arrivent
Ils ont 15, 16, 17 ans
Ils arrivent
Tout encapuchonnés de leur vie
Ils arrivent
Déposent à terre sur un matelas leur corps épuisé
Ils sont là au collège Maurice-Scève
où est né l’abbé Pierre ».
Plus que l’enfer
- Texte David
« Un voyage pas comme les autres,
Un chemin vers l’enfer, mais plus que l’enfer.
Le seul crime que j’ai commis, c’est de fuir l’insécurité.
J’ai emprunté un chemin qui me mène vers l’enfer, sur Terre, sans le savoir.
Tellement ma vie était précaire, j’ai préféré aller devant
Un voyage pas comme les autres,
Un chemin vers l’enfer, mais plus que l’enfer.
Dans le camp en Libye, j’ai vu des femmes violées,
des hommes battus à mort,
des enfants affamés.
J’ai vu aussi des cadavres, jetés à la poubelle comme des poulets.
Des hommes de 30 ans qui pesaient 30 kilos.
En Libye, le trafic des noirs, c’est comme un marché,
Où on va s’acheter, une chèvre.
Mais même les chèvres vivent mieux que nous, là-bas.
Parce que, c’est plus que l’enfer.
Un voyage pas comme les autres,
Un chemin vers l’enfer, mais plus que l’enfer.
Dans le désert de Libye,
J’ai vu des 4×4 garés au milieu de nulle part,
Remplis de cadavres, secs,
Comme des poissons fumés, sous le sable chaud.
Ceux qui voyageaient dans la citerne,
Arrivaient à destination,
Morts, étouffés par l’essence.
Et leur seul crime, c’est de voyager.
Hélas, on voyage tous, à un moment dans la vie.
#-Alors qu’est-ce que j’ai fait, pour mériter tout cela ?
Un voyage pas comme les autres,
Un chemin vers l’enfer,
mais plus que l’enfer.
Mon cœur pleure, mon âme saigne,
C’est comme si une partie de moi était morte.
Quand je pense à toute cette torture,
Quand je revois mes frères et moi devant un inconnu,
Fouillées, les parties intimes,
Femmes, comme hommes.
Mon cœur pleure, mon âme saigne.
Pour tous ces hommes tombés dans l’obscurité totale,
Dans un silence absolu,
Enfouis, sous le sable chaud,
Sous les ordures dans le camp,
Noyés, au fond de la mer,
Tous ceux dont leur identité est connue par un simple chiffre.
- Un voyage pas comme les autres,
Un chemin vers l’enfer, mais plus que l’enfer. »