Comme j’ai souvent l’occasion de l’écrire, la mauvaise humeur qui s’exprime dans ce billet l’emporte largement sur la bonne humeur que je suis pourtant en droit d’espérer. J’ai beau scruter l’actualité du monde de la santé, il faudrait être d’un optimisme pathologique pour trouver actuellement une raison de me mettre de bonne humeur, quoique !! Je reviens d’un forum sur l’accès aux soins qui m’a fait beaucoup de bien. Ce forum, initié par la sénatrice Aline Archimbaud, a été un véritable moment d’espérance. Quand les acteurs de l’accès aux droits, qu’ils soient professionnels du champ médico-social, personnes concernées par l’exclusion sociale, agents des institutions publiques, se rencontrent, se parlent, échangent sur leurs expériences et décident de lutter ensemble contre l’in-accès aux droits, alors on peut croire à l’augmentation du « pouvoir d’agir ».
Mais, lors de cette rencontre, j’ai aussi trouvé de quoi nourrir ma colère et, tout compte fait, cela atténue mon espérance. Raison d’être encore plus en colère. J’ai appris que dans le budget de la France, le gouvernement avait inscrit dans la colonne des recettes les sommes relatives au non recours aux droits. Le gouvernement prévoit que plusieurs milliards de dépenses de protection sociale – pour le RSA, pour l’ACS, et autres prestations sociales – étant difficilement accessibles aux personnes qui y ont droit ne seront pas dépensés, et donc que cela engendrait de facto une recette pour l’Etat. Alors là, le cynisme est à son comble. Ce gouvernement et ses institutions se parent des vertus de la lutte contre les inégalités sociales et cyniquement inscrivent comme profit l’augmentation des inégalités du fait de l’in-accès aux droits.
Quand on dissèque, comme nous l’avons fait pendant deux jours, les procédures qui devraient ouvrir des droits aux citoyens qui en ont besoin pour survivre, on fait le constat unanime que ces procédures sont d’une très grande complexité, assimilable à de la maltraitance.
Conséquence : chiffrer cette maltraitance et l’inscrire dans la rubrique recettes mérite bien le prix Nobel du cynisme.