Fromage et dessert

Avoir le droit au fromage et au dessert, c’est une expression que j’emploie souvent pour dire que le menu de la vie peut être plus généreux que l’on en croit.
Oui, on a le droit de ne pas se laisser écarteler par les paradoxes de l’existence. Oui, on a le droit au jour et à la nuit, au chaud et au froid, au plaisir de la liberté et à la protection du lien, à la tranquillité et à la découverte. Oui, on a le droit de bénéficier des deux côtés de la médaille de la vie.
Cela se décline aussi dans le soin.
Pour le suivi de grossesse, on peut bénéficier de la sécurité de la technique hospitalière et aussi de la chaleur d’un accompagnement par une sage-femme ou un généraliste impliqué près de chez soi.
Pour les maladies chroniques, on a le droit d’être au courant des dernières avancées de la science, et aussi de décider de s’écouter et d’utiliser les remèdes anciens et éprouvés.
Alors, on ne se met pas, on ne met pas l’autre dans des conflits de loyauté paralysants.
Je me demande si cette nécessité de revendiquer le droit au fromage et au dessert, le droit à la légitimité d’aspirations apparemment contradictoires n’entre pas dans le succès du diagnostic de bipolarité.
Peut-être que l’industrie pharmaceutique a sollicité des linguistes. Une enquête serait à faire. Qui sait si des sémioticiens n’ont pas vendu le terme de bipolarité aux psychiatres pour caractériser quasi tous ceux qui sont en difficulté psychique, mais aussi aux malades pour qui ce terme est peut-être valorisant et connoté du côté du fromage et du dessert ?

jeudi 22 janvier 2015, par Elisabeth Maurel-Arrighi

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