La loi sur la fin de vie adoptée

La loi sur la fin de vie a été adoptée le 27 janvier par l’assemblée nationale et par le sénat. La proposition d’une nouvelle loi sur la fin de vie portée par les députés Léonetti et Claeys.

Après deux navettes entre l’Assemblée nationale et le Sénat avait fait l’objet, le 19 janvier, d’un Accord au niveau de la commission mixte paritaire (7 sénateurs et 7 députés).
Pour l’essentiel ce texte d’accord, et donc la loi, reprend le Texte adopté en première lecture par l’assemblée nationale le 17 mars 2015.

• Le texte d’accord réaffirme

« Le droit pour toute personne de refuser ou de ne pas recevoir un traitement. Le suivi du malade reste cependant assuré par le médecin, notamment son accompagnement palliatif. »
Les soignants doivent être formés aux soins palliatifs
Les soins et traitements « ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis lorsqu’ils résultent d’une obstination déraisonnable. Lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou lorsqu’ils n’ont d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris, conformément à la volonté du patient et, si ce dernier est hors d’état d’exprimer sa volonté, à l’issue d’une procédure collégiale définie par voie réglementaire ».

• Le texte d’accord introduit la notion de sédation profonde et continue (jusqu’à présent les textes parlaient de soulagement de la souffrance)

Lorsque le patient peut exprimer sa volonté
« À la demande du patient d’éviter toute souffrance et de ne pas subir d’obstination déraisonnable, une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès, associée à une analgésie et à l’arrêt de l’ensemble des traitements de maintien en vie, est mise en œuvre »
Cette sédation ne peut s’appliquer que dans des cas bien définis :
« 1° Lorsque le patient atteint d’une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme présente une souffrance réfractaire aux traitements ;
2° Lorsque la décision du patient atteint d’une affection grave et incurable d’arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable
 »
(Les sénateurs ne souhaitaient pas que la sédation profonde et continue puisse être mise en œuvre pour ces derniers patients)

Lorsque le patient ne peut pas exprimer sa volonté et au titre du refus de l’obstination déraisonnable « dans le cas où le médecin arrête un traitement de maintien en vie, celui-ci applique une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu’au décès, associée à une analgésie ».
« Cette sédation est mise en œuvre selon la procédure collégiale définie par voie réglementaire qui permet à l’équipe soignante de vérifier préalablement que les conditions d’application prévues aux alinéas précédents sont remplies
 ».

Nutrition et hydratation sont considérés comme des traitements et peuvent donc être arrêtés lors de la mise en place de la sédation profonde et continue conformément à la volonté du patient . Le Sénat jugeait pour sa part que l’hydratation était un « soin » qui devait être maintenu jusqu’au décès.

Ce texte ne supprime pas l’interdit d’accélérer intentionnellement la mort  : la sédation profonde combinée à l’arrêt de tout traitement (y compris nutrition et hydratation artificielle), va entraîner plus rapidement la mort (dans son rapport le Comité Consultatif National d’Éthique parle de quelques heures à deux semaines) mais elle ne doit pas avoir pour but de la donner (c’est la question du dosage des traitements sédatifs).
La sédation profonde et continue peut être mise en œuvre en établissement de santé, en EHPAD et à domicile.

• Le texte d’accord affirme la volonté de développer les directives anticipées et prévoit que celles-ci « s’imposent » au médecin (jusqu’à présent le médecin devait seulement en « tenir compte »)

« Toute personne majeure peut rédiger des directives anticipées pour le cas où elle serait un jour hors d’état d’exprimer sa volonté. Ces directives anticipées expriment la volonté de la personne relative à sa fin de vie en ce qui concerne les conditions de la poursuite, de la limitation, de l’arrêt ou du refus de traitement ou d’acte médicaux. »

Ces directives anticipées seront révisables et révocables à tout moment. Elles pourront être rédigées selon un modèle, dont le contenu sera fixé par décret, qui prévoira « la situation de la personne selon qu’elle se sait ou non atteinte d’une affection grave au moment où elle les rédige »

Le texte prévoit des cas où les directives ne s’imposeront pas au médecin : « en cas d’urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation » et « lorsque elles apparaissent manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale ». La décision de ne pas en tenir compte doit être « prise à l’issue d’une procédure collégiale définie par voie réglementaire et est inscrite au dossier médical. Elle est portée à la connaissance de la personne de confiance désignée par le patient ou, à défaut, de la famille ou des proches ».

L’importance et le rôle de la personne de confiance sont réaffirmés « son témoignage prévaut sur tout autre témoignage ». Cependant la commission paritaire n’a pas retenu la possibilité – présente dans le projet de loi – pour la personne de confiance de « demander les informations du dossier médical nécessaires pour vérifier si la situation médicale de la personne concernée correspond aux conditions exprimées dans ses directives anticipées. »

• Commentaires

Ce texte apporte des améliorations quant à l’accompagnement de la fin de vie du fait de la possibilité, dans certains cas bien définis, et selon les volontés du patient de mettre en place une sédation profonde et continue jusqu’au décès. Il donne plus d’importance aux volontés du patient à travers ses directives anticipées.
Mais il ne répond pas à l’ensemble des problématiques de la fin de vie car elle persiste à interdire l’aide à mourir sous la forme de suicide assisté ou d’euthanasie.
Il affirme le droit à des soins palliatifs pour toute personne le nécessitant, ce qui est loin d’être le cas actuellement. Cela pose la question de la formation des soignants et des moyens à mettre en œuvre pour permettre un réel accompagnement de la fin de vie ?
Voir aussi Commentaires à propos de la proposition de loi sur la fin de vie

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lundi 8 février 2016, par Marie Kayser

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