Le 19 décembre 2008, notre Edito intitulé "Information médicale et conflits d’intérêts : un label ’Santé propre’ pour les experts et les journalistes ?", citait cette initiative louable prise par les intéressés eux-mêmes aux Etats-Unis. On en est loin en France où, s’il faut en croire la Représentation nationale elle-même, les entorses à la loi sont le fait de ceux qui devraient pourtant donner l’exemple.
En témoigne cette question posée par François Autain, que nous signale le FORMINDEP.
Application de l’article L. 5323-4 du code de la santé publique relatif à la prévention des conflits d’intérêts au sein des personnels des agences de santé
Question n° 08144 adressée à Mme la ministre de la santé et des sports
Texte de la question :
M. François Autain attire l’attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur la gestion des liens d’intérêts des experts de la Haute Autorité de santé.
L’article L. 5323-4 du code de la santé publique interdit non seulement aux personnes collaborant aux travaux de la Haute Autorité de santé de « traiter une question dans laquelle elles auraient un intérêt direct ou indirect » sous peine de sanctions pénales, mais leur impose aussi de déclarer et de tenir à jour « leurs liens, directs ou indirects, avec les entreprises ou établissements dont les produits entrent dans le champ de compétence de [la Haute Autorité], ainsi qu’avec les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans les secteurs correspondants ».
Or il s’avère qu’aucune de ces dispositions n’est respectée. En effet, sur l’existence de liens d’intérêts entre les experts de la Haute Autorité de santé et l’industrie du médicament, il constate que, dans le cadre de la recommandation professionnelle sur la « prise en charge de la maladie d’Alzheimer et des maladies apparentées », la Haute Autorité, en constituant le comité d’organisation ainsi que le groupe de travail, n’a pas pris en compte les liens existants entre ces membres et les industries productrices de médicaments traitant la maladie d’Alzheimer ou les démences. La déclaration publique d’intérêts de l’un des cinq membres du comité d’organisation fait ainsi état de liens durables ou permanents sur une période allant de 2000 à 2008 avec quatre firmes impliquées dans la commercialisation de traitements de ces maladies. De même, la présidente du groupe de travail chargé d’élaborer la recommandation déclare être liée au laboratoire commercialisant la substance Donepezil - substance active d’un des quatre médicaments traitant la maladie d’Alzheimer – en sa qualité de co-investigateur pour la réalisation d’essais ou d’études non cliniques, précliniques, cliniques ou épidémiologiques et ce sur la période 2007-2009.
Par ailleurs, il constate également l’existence de liens majeurs entre certains membres du groupe de travail chargé de la recommandation professionnelle relative au « traitement médicamenteux du diabète de type 2 » en date de 2006 et les industries commercialisant des médicaments indiqués dans sa prise en charge. En ce qui concerne l’obligation de déclarer tout lien direct ou indirect ainsi que de tenir à jour ces déclarations, le constat est identique. Les déclarations publiques d’intérêts de quatre des cinq membres du comité d’organisation chargé de la recommandation professionnelle relative à la « prise en charge de la maladie d’Alzheimer et des maladies apparentées » ne sont pas accessibles alors même que l’un d’entre eux présente un lien d’intérêt en sa qualité d’investigateur d’un essai clinique sur l’un des quatre médicaments indiqués dans le traitement de la maladie d’Alzheimer. Il en va de même pour les membres du groupe de travail chargé d’élaborer la recommandation professionnelle relative au « traitement médicamenteux du diabète de type 2 » : seules six déclarations publiques d’intérêts sur vingt-sept sont accessibles.
Par conséquent, dans un souci d’indépendance et de transparence, il souhaite connaître les mesures qu’elle compte mettre en œuvre pour que soit appliqué l’article L. 5323-4 du code de la santé publique afin, d’une part, de faire cesser les conflits d’intérêts existants au sein de la Haute Autorité de santé et, d’autre part, de rendre effective l’obligation pour l’ensemble des personnes travaillant pour la Haute Autorité de rendre publiques leurs déclarations d’intérêts.