La nouvelle est encore chaude, extraite du Journal Officiel du 30 octobre [1] : l’Eylea® reçoit son AMM (Autorisation de mise en marché), au prix de 810.12 €. Soit, à peu de choses près, celui du Lucentis® et environ 20 fois plus cher que ne le serait l’Avastin® reconditionné.
Or, qu’écrivait l’Assurance maladie dans son rapport consacré à la maîtrise des dépenses de santé [2] ?
« A l’instar de ce qui s’est passé aux Etats-Unis, l’arrivée prochaine d’Eylea® (aflibercept) sur le marché français va rompre la situation quasi monopolistique de Lucentis® dans la prise en charge médicamenteuse de la DMLA par des spécialités disposant d’AMM. Compte-tenu de l’ASMR V attribuée à Eylea®, son inscription au remboursement doit engendrer, conformément au code de la Sécurité Sociale, une économie dans le coût du traitement de la DMLA. L’Assurance maladie estime donc que le contexte impose une baisse significative du prix du Lucentis® et une fixation du prix d’Eylea® à un niveau permettant effectivement des économies dans le coût du traitement de la DMLA. »
Et que répondait Pratiques, en écho à ces bonnes intentions [3] :
« Maintenant, l’arrivée prochaine de l’Eylea® est-elle susceptible de vraiment changer la donne ? On peut en douter. »
Et, plus loin, dans le même article : « … qui peut croire que le fait d’introduire deux poids lourds de plus (Bayer et Sanofi) dans le panorama serait susceptible de modérer les appétits des deux premiers – Roche et Novartis –, face à un marché en croissance exponentielle ? »
Alors, laquelle des deux s’est révélée meilleur devin, de la revue Pratiques ou de l’Assurance maladie ? Qui a parlé avec emphase de « rompre la situation quasi-monopolistique de Lucentis® » ou encore de « baisse significative du prix du Lucentis® » et finalement, d’« économies dans le coût du traitement de la DMLA » ? Tout un chacun est maintenant à même de faire ses comptes. Gageons que, dès 2014, si ce n’est même 2013, les remboursements de cette famille de médicaments auront atteint les 500 millions d’€, ajoutant une pierre de plus aux reniements des pouvoirs publics, concernant leur prétendu objectif de maîtrise des dépenses de santé.
Pratiques s’était récemment plainte du « silence assourdissant » [4] de Marisol Touraine, à propos de l’ensemble de ce scandale. L’arrêté qui vient d’être pris, sous votre égide, Madame la Ministre, est la réponse la plus franche que nous pouvions espérer. Nous savons désormais quels sont les intérêts qui gouvernent votre Ministère. Les Français apprécieront.