De Big à Little Brother : soignants ou flics, il faut choisir !

Quelle est la capitale européenne qui détient le record de densité au m2 des fonctionnaires de police en tenue dans ses rues : une capitale de « sauvages » balkaniques, certainement ! Non, vous n’y êtes pas. Risquons-nous : de grandes capitales d’Europe occidentale particulièrement visées par le terrorisme : Londres, Madrid ? Raté. Bingo, vous l’aviez deviné : Paris.

Et maintenant, qu’en est-il des mêmes fonctionnaires en civil ? Mais ici, comment le savoir, puisque, par définition, ils ne sont distinguables ni de vous, ni de moi ? On pourrait imaginer, qu’étant invisibles, l’Etat se prive encore moins de les avoir multipliés ?

Eh bien, il faut croire que non, qu’on manque encore et toujours de Grand Yeux, de Grandes Oreilles, puisque les Pouvoirs publics entreprennent, avec Little Brother passé aux commandes du ministère de l’Intérieur au ministère de la Totalité, une campagne de recrutement sans précédent.

Les faits :
-  Octobre 2006, à Nantes, une femme sans papiers, Mama Tacko Galledou est expulsée par la PAF (Police de l’Air et des Frontières), alertée de sa sortie imminente de l’hôpital par un agent hospitalier zélé (Libération : 27 octobre 2006).
-  Novembre 2007, à Toulouse, la préfecture de Haute-Garonne annonce qu’elle monte un « groupe de référents » dans les administrations telles que la CAF, les ASSEDIC, la Ddass… dont l’objet est d’alerter la PAF en cas de doute sur l’authenticité des documents fournis par des étrangers (Libération : 26 novembre 2007).
-  Novembre 2007, encore : dans le Pas-de-Calais, deux assistantes sociales de Terre d’Asile sont placées en garde à vue pour avoir simplement effectué les tâches habituelles dévolues à cette association ayant pourtant pignon sur rue (Communiqué de presse de France-Terre d’Asile du 22 novembre 2007).
-  Décembre 2007, janvier 2008, l’étau se resserre autour des médecins libéraux eux-mêmes, sommés de participer à l’Opération de Flicage Généralisée : leur formation sera désormais orientée non plus sur le mieux soigner, mais le mieux surveiller. Le système se renforce encore par la délégation des contrôles des arrêts maladie non plus aux médecins conseils de l’Assurance maladie, mais à des médecins directement payés par les patrons, enrôlés au sein de cabinets de recrutement.

Ces faits sont mis bout à bout sur notre site par les collaborateurs de Pratiques - voir les articles de Jacques Richaud (rubrique : « Ils ont écrit ») et Didier Ménard (rubrique : « Billet d’humeur »), Marie Kayzer (Rubrique : « Actualité ») notamment ; voir aussi celui de Noëlle Lasne (rubrique : « Lire Pratiques »), quant à l’étendue du complot (cela s’appelle bien ainsi, en bon français ?) destiné à priver d’aide médicale tous les étrangers en situation irrégulière : sommes astronomiques qui leur sont demandées, suite à une hospitalisation, poursuites engagées auprès de ceux qui les hébergent, etc.

Certes, les faits rapportés ci-dessus ne sont pas de même nature : délation, arrestations d’un côté, incitations, surveillance de l’autre. Dans le cas des premiers, des polémiques, quant à l’existence d’instructions explicites visant à impliquer les personnels dans la répression, ont même opposé les dirigeants d’hôpitaux à des syndicats (communiqué SUD-CGT des hôpitaux de Marseille et réponse de M. Guy Vallet, Directeur général de l’AP-HM).

Il n’empêche, l’accumulation de ces éléments laisse planer un doute.

Les ministres sont désormais « évalués » selon des critères élaborés par un cabinet privé. La qualité de nos soins le sera-t-elle, dans un premier temps, par le directeur des Renseignements généraux, avant de l’être, une fois ces derniers privatisés, par la milice adéquate ?

Bienvenue au règne de Little Brother, un nouveau métier est né : celui de Flic-Soignant.

vendredi 7 mars 2008, par Lucien Farhi

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