Je n’ai jamais aimé cette expression « faire son deuil ». Je ne la comprenais pas, je ne la « sentais » pas. Elle ne me « parlait » pas. Lorsque je pensais à ceux de mes proches qui étaient morts et d’abord à mes parents, je me disais que j’avais vécu et que je vivais quelque chose d’important, (…)
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# Le 22 novembre 2014 à 08h50, par Anaîs Tasie En réponse à : on ne fait pas son deuil, on est en deuil
Merci pour cette réflexion
J’ai vécu plusieurs deuils difficiles, celui d’un collègue qui m’avait servi de "père spirituel", celui d’un enfant et celui d’un psychanalyste.
Pour le premier, à chaque fois que je parlais de lui avec nostalgie, une de mes collègues me disait : "arrête avec ton deuil pathologique", ce que je trouvais très désagréable, car comment faire pour vivre avec l’absence sans parler de celui qui n’est plus là ? Mais j’ai compris que cela gênait beaucoup mes autres collègues qui ne l’avaient pas connu, comme si rien n’était plus possible sans lui...
Pour le second, 22 ans après il est très difficile encore pour moi d’en parler, mais le dernier psychanalyste que j’ai rencontré m’a dit, étonné (c’était la première fois que je lui racontais mon histoire) : "vingt-deux ans ?" et j’ai réalisé alors que le deuil était un peu "fait" quand même, que je pouvais passer à autre chose...
Le troisième, il m’a "sauvée" en me disant, justement quand je m’énervais contre cette formule "faire son deuil", il m’a dit : "On ne fait pas un deuil, on est en deuil toute sa vie mais on peut quand même être heureux"
Lui aussi est mort, j’avais commencé une analyse avec lui alors qu’il était déjà déjà âgé, et un peu malade (il toussait beaucoup derrière mon divan...), mais il m’a tellement aidée que je n’ai pas regretté d’avoir fait le pari qu’il tiendrait. Cela a duré cinq ans. Quand il est mort, j’ai dit : "j’ai l’impression d’avoir perdu mon père et ma mère à la fois "mais c’était un peu exagéré, et pas sympa pour mes parents, toujours vivants. J’ai trouvé très important d’aller à son enterrement, je l’ai raconté dans Pratiques, dans un numéro sur les rites...
Bon, voilà ce que cet article de Jean-Pierre Lellouche m’inspire, et je me garde bien de dire à qui que ce soit qu’on peut "faire son deuil", je sais que cela ne veut rien dire. On est en deuil, mais par chance on est vivant(e)...
# Le 22 novembre 2014 à 23h34, par AMP En réponse à : Faire son deuil
oui, c’est vraiment insupportable d’entendre des gens dire : elle n’a pas encore fait son deuil ? comme s’il était pathologique de continuer à parler de sa douleur au bout d’un certain temps , dans un temps bien établi...Croient-ils vraiment qu’on peut régir ce évènement. Derrière cette remarque, Il y a des gens qui, eux, n’ayant jamais eu de deuil, repoussent l’idée d’une incapacité à tout maitriser. Pouvoir se débarrasser d’un deuil comme lorsqu’on faisait une saignée .. Et l’on entend aussi : "on a monté une cellule de crise...Au bout de 1 à 2 séances vous devez aller bien"
# Le 30 novembre 2014 à 14h18, par Lellouche En réponse à : Faire son deuil
Lorsque j’ai écrit Faire son deuil, je n’avais pas lu le numéro de Philosophie magazine
Il y a là plein de choses fortes et profondes.