Les questions de la santé et de la sécurité sociale sont des questions sociales de première importance. Or quand les médias s’en emparent, ils concourent généralement (mais pas toujours...) à la production et à la reproduction d’une vision dominante. Laquelle ? Pourquoi ?
Pour en débattre...
« Jeudi d’Acrimed »
Jeudi 20 novembre à 19h
à la Bourse du travail de Paris, 3 rue du Château d’eau, Paris 10ème
Avec
Julien Duval, sociologue, auteur de Mythe du « trou de la Sécu », Raisons d’Agir, avril 2006. Lire ici même : « Les médias et le « fameux déficit de la sécurité sociale »
Frédéric Pierru, sociologue, auteur de Hippocrate malade de ses réformes, Editions du Croquant, mars 2007. Contribution à venir.
En guise de présentation...
Les questions de la santé et de la sécurité sociale sont des questions sociales de première importance. Or quand les médias s’en emparent, ils concourent généralement (mais pas toujours...) à la production et à la reproduction d’une vision dominante qui laisse peu de prise à un véritable débat public. Des chiffres indiscutables donnent communément lieu à des interprétations ou des conclusions qui le sont beaucoup moins. De faux débats s’organisent autour de propositions quasi indémontrables, entre des protagonistes qui accordent sans sourciller une validité générale à des raisonnements partiels et, par conséquent, faussés (même quand ils sont sont vérifiés). Les objections très argumentées de certains syndicats, partis minoritaires ou intellectuels critiques contre tel ou tel lieu commun trouvent peu d’espace d’expression dans les médias et la vision dominante se perpétue sans que le crédit collectif dont elle bénéficie soit entamé.
Cela est particulièrement vrai de la tendance journalistique à assimiler la Sécurité sociale à son déficit : le fameux « trou de la Sécurité sociale ». Le traitement journalistique, et plus généralement public, des questions de santé et d’assurance maladie fourmille d’autres exemples : l’exagération, au regard de la « réalité » statistique, des « abus » et des « fraudes » pour expliquer l’ampleur de « trou », l’idée (fausse) qu’il y aurait une « explosion » des dépenses de santé en France, qui serait par ailleurs le seul pays à ne pas avoir réussi à maîtriser ses dépenses de santé faute de « volonté politique » face aux « corporatismes » (c’est le thème de l’ « exception française » avancé par tous les déclinologues médiatiques), etc.
La liste est longue de ces lieux communs qui font le miel des commentaires journalistiques. Un cas particulièrement intéressant est fourni par l’inflation des (més)usages de la comparaison internationale qui fonctionne désormais comme argument d’autorité pour disqualifier « scientifiquement » - en l’occurrence, médiatiquement - le « modèle social » français et accélérer la mise en œuvre des réformes néolibérales.
Comment expliquer l’emprise étroitement comptable et gestionnaire sur le débat public, qui exclut de sa compréhension les agents issus des classes populaires pourtant les plus attachés à l’existence de la Sécurité sociale ? Sans doute par les transformations conjointes d’une action publique qui mobilise des expertises de plus en plus économistes et technocratiques et d’un journalisme dont les conditions d’exercice l’éloignent chaque jour davantage d’une approche sociale des questions sociales.