Grippe A : Quel coût, pour la collectivité nationale, de la politique de vaccination menée en France ?
Suite à la parution de notre Edito - "Grippe A : Quand on aime on ne compte pas !" - nous avons reçu d’un de nos scrupuleux lecteurs-économistes la lettre suivante, accompagnée d’un commentaire détaillé, sous la forme d’une série de scénarios chiffrés, aboutissant à nuancer nos conclusions : tout compte fait, en comparant les coûts-avantages de la vaccination massive à ceux d’une vaccination limitée aux personnes à risques, le différentiel que la collectivité nationale supporte aujourd’hui du fait des choix aberrants des pouvoirs publics, serait de l’ordre du milliard d’€. Dont acte à notre censeur !
Voici le texte de la lettre de Jacques Vercueil
Je partage comme vous, et certainement comme beaucoup de gens un peu soucieux de s’informer, un fort dégoût pour une façon de faire de la politique - plus grave, de diriger le pays - qui considère que peu importe ce qu’on fait, pourvu que le public croie que l’on fait bien - et que les copains profitent, sans quoi, à quoi ça sert de gouverner ? La communication alarmiste à propos de la grippe A, et les décisions qui ont suivi - et qui sont remises en cause maintenant qu’il apparait, non pas que c’était idiot, mais que les gens s’en rendent compte ! - en est un triste exemple. Mais il ne faudrait pas tomber dans le même travers, et répondre à l’alarmisme par du contre-alarmisme. Le chiffre de deux milliards de gaspillage que vous avancez dans l’édito est énorme - c’est le coût de la campagne de vaccination tout entière ! Vous indiquez en quelques mots les éléments qui vous y ont conduit : je me suis mis moi aussi à ma table de calcul, en essayant d’utiliser les chiffres et sources que vous citez, et je suis plus modeste - si un milliard de gaspillage (en euros !) peut être considéré comme modeste ! Ceci dit, continuez votre bon boulot d’aider les lecteurs à faire un peu le tri dans ces communications délirantes. Merci.
Les lecteurs intéressés par l’économie de la santé trouveront à larubrique "Dossiers" de notre site le compte rendu complet de ce "modèle" et pourront, s’ils le désirent, non seulement y répondre par le forum attaché à cet article, mais encore eux-mêmes modifier à leur guise les paramètres utilisés afin d’étudier la sensibilité dudit modèle à leur variation.
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mardi 19 janvier 2010, par Jacques Vercueil
#Gouvernement, politique, démocratie, Etat
#Grippe A
#Politique de la santé, système de santé
La mise à jour des paramètres utilisés par J. Vercueil dans la version présente actuellement sur le site, avec les données épidémiologiques récentes (http://www.prescrire.org/aLaUne/dossierGrippeA15dec2.php), conduit aux résultats suivants :
_ ? Taux de morbidité : fin Novembre, 4 millions de personnes auraient eu une grippe A avérée. Il paraît raisonnable de penser qu’à la fin de l’épidémie, ce nombre devrait se situer entre 6 et 7 millions, soit 10% de taux de morbidité et non pas 30%.
_ ? Taux de mortalité : 1décès pour 40 000 personnes contaminées, soit 0.0025% et non pas 0.005%
De plus, même dans le cas d’une vaccination massive, on peut considérer qu’il n’a jamais été question de vacciner intégralement les 65 millions de Français. On peut donc retenir un objectif raisonnable, pour ce scénario, de 75% de la population. Pour autant, le coût de la vaccination du scénario de vaccination massive demeurerait inchangé puisque les vaccins ont déjà été achetés.
En sens contraire, le taux de protection du vaccin pourrait plutôt être de l’ordre de 60 que 50%, jouant en faveur de la vaccination.
Le jeu combiné de ces modulations conduit à un différentiel de coût global entre le scénario de vaccination massive et celui d’une vaccination limitée aux personnes à risques de 1.3 milliard d’€, au bénéfice de ce dernier. Si, en outre, on adopte pour coût de la vaccination le chiffre de 2.2 milliards avancé au Sénat et non plus 2 milliards, le différentiel entre scénarios atteint 1.5 milliard, soit le bas de la fourchette de 1.5 à 2 milliards d’€ avancée dans notre Edito