Une Association d’IMC pour quoi faire ?

Une association qui réunit des personnes atteintes d’infirmité motrice cérébrale (IMC) ayant en commun la motivation de vivre en « milieu de vie ordinaire » et de ne plus être un objet d’études pour les « sachant », mais au contraire des Citoyens concernés apportant leur propre expertise.

Philippe Oglobeff
juriste, président de l’Association Citoyenneté IMC

À l’origine, l’association Citoyenneté IMC, ce sont des femmes et des hommes d’une même génération. Avec une histoire commune, celle qui découle de la loi de 1975. Des IMC ont grandi à la faveur de cette loi, en bénéficiant d’un enseignement scolaire adapté ou spécialisé, mais aussi d’un parcours de soins adaptés à leur handicap.
Les infirmes moteurs cérébraux ont été définis par le professeur Tardieu, en 1954, comme « un groupe de sujets paralysés cérébraux, qui ont en commun une lésion cérébrale fixe, d’origine périnatale entraînant des dégâts plus ou moins considérables de la motricité, mais laissant intacte totalement ou en grande partie, les capacités mentales et relationnelles ».

Des handicaps invisibles

De ces lésions résulte un handicap complexe et multiforme. Si la personne IMC a des difficultés motrices visibles, il en existe parfois d’autres, qui sont invisibles au regard d’autrui. Le quotidien a ses défis, la conquête de l’espace ne va pas de soi : comment se situer dans l’espace, comment voir dans l’espace ? Cela nécessite un apprentissage et un accompagnement spécifiques. C’est le cas pour la lecture et l’écriture qui relèvent précisément des problèmes de la spatialisation. L’espace, c’est bien sûr aussi la mobilité, donc : fauteuil ou pas fauteuil ? Car le handicap, c’est le fauteuil, n’est-ce pas ? Que non, des personnes IMC marchent. Quitte à ce qu’elles ne marchent pas droit : le pied est en rotation interne, le genou en flexion, le talon ne touche pas bien le sol, le patient IMC marche trop sur la pointe des pieds ! C’est comme cela, en respectant ses appuis au sol, que le citoyen IMC marche — à son pas et à son rythme. Parfois la personne IMC rencontre des difficultés d’élocution associées à tort par l’interlocuteur non averti à une déficience intellectuelle. Ces « troubles du langage », comme on dit, sont vécus douloureusement.

Des citoyens IMC qui prennent la parole et se prennent en charge

La loi du 11 février 2005 pose comme principe la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Fort bien. Mais concrètement, comment peut-elle se traduire ? C’est d’abord la prise de parole des personnes concernées, exposant leurs besoins et leurs priorités.

C’est ensuite une prise de position qui consiste à vouloir faire sortir l’infirmité motrice cérébrale du champ médical spécialisé. L’orientation politique de notre projet associatif est le partage des connaissances avec les professionnels de santé qui exercent en libéral et à leur mise en contact et en réseau.
Par son positionnement, ce professionnel est confronté, ou peut l’être, à un patient IMC. Des questions peuvent surgir. Comment comprendre et agir ? De quels outils pratiques dispose-t-il ? La réponse peut venir des personnes IMC elles-mêmes à travers notre association citoyenne !

Il y a de bons praticiens

Il faut le dire : pour le patient IMC, le bon praticien du soin existe. Hélas trop rare, peu connu et reconnu, souvent isolé, il accompagne son patient et sa famille. Il sait, contrairement à d’autres, à la pointe de la recherche et habitués des colloques, cultiver parfois le doute, partager son expertise, admettre la contradiction, et il obtient souvent des résultats très satisfaisants.
Le dialogue doit aussi être engagé avec les étudiants qui se destinent aux métiers de la santé. Avant de choisir leur spécialisation professionnelle, ne gagneraient-ils pas à connaître quels sont les praticiens les plus recherchés par les intéressés ? Selon l’expérience des membres de notre association Citoyenneté IMC, le classement à retenir serait le suivant : 1) le kiné formé à la rééducation des IMC, indispensable à l’enfant, mais aussi à l’adulte pour acquérir ou conserver son autonomie, prévenir et soulager la douleur ; 2) l’ostéopathe en complément ou en l’absence du kiné ; 3) le médecin généraliste ; 4) l’infirmier/ière ; 5) l’orthopédiste ; 6) le psychologue ; et 7) le sophrologue.
Tout cela est un pari sur l’avenir, le travail ne manque pas.


par Philippe Oglobeff, Pratiques N°61, mai 2013

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